News - 28.07.2014

Tous les raisonnements sur l'avenir ne sont pas criminels….

Il me souvient d'avoir coché au crayon, voilà quelques années, un propos d'Emile Zola sur la révolution rapporté dans son chef- d'œuvre 'Germinal' (1885), - un propos, ou plutôt un échange de propos entre deux ouvriers en lutte contre le capital, qui m'avait interpellé à l'époque à la fois par la pertinence de l'interrogation que pose l'action révolutionnaire et par la violence extrême d'une certaine réponse à ladite interrogation. Mais comme, en ce temps révolutionnaire arabe, baptisé, ici de 'printemps', là de 'jasmin', et l'interrogation et la réponse donnée à celle-ci me paraissent acquérir une force et une actualité toutes particulières, j'ai trouvé approprié de redonner vie , plus de deux cents ans après, à cet échange de propos contenu dans le célèbre roman de Zola et dont voici le contenu:   
 
'' Dis-moi ton  programme, s'adressait un des ouvriers révoltés, du nom d'Etienne, au leader du mouvement social, nommé Souvarine. Nous voulons savoir où nous allons, nous autres''. 
 
" Tous les raisonnements sur l'avenir, répond  ce dernier, sont criminels, parce qu'ils empêchent la destruction pure et entravent la marche de la révolution''.
 
Mais de Tunis à Tripoli au Caire à Sanaa à Damas à Bagdad, que sais-je encore, ne sommes-nous pas des milliers, des millions d'Etienne qui demandons à ceux que la révolution des exclus a mis au pouvoir ''quel est leur programme'', et qui ''voulons savoir où nous nous allons''?
 
Puis à Tunis comme à Tripoli comme au Caire comme à Sanaa comme à  Damas comme à Bagdad, n'avons-nous pas nous aussi des 'Souvarine", avoués ou déguisés, confirmés ou apprentis, qui par la glaive, qui par la plume, qui par les prêches, cassent, détruisent, brûlent, assassinent,  toujours au nom de la révolution, voulue et menée, non par eux , mais par d'autres?
 
Et  si jamais elle n'était  que 'destruction pure'  de ce qui est tunisien, de ce qui fut tunisien, de la mémoire tunisienne, de  cette identité tunisienne plurielle, forgée par le temps, l'histoire, le mode de vie propre, les moments de fierté et d'espérance et ceux de frustration et de désespérance vécus en commun, les proximités avec l'Autre, l'ouverture sur le progrès universel? Et si jamais  elle n'était que cela, notre révolution, dite du 'Jasmin', ne serait-elle  pas alors ''trahison pure''; '' confiscation pure''  du rêve tunisien, de ce grand projet tunisien historique d'intégrer, autrement, enfin, le monde en perpétuel devenir?
 
Non pas en nous dissolvant un peu plus dans le maelstrom d'une globalisation outrancièrement libre-échangiste et technologiste. Non en substituant à notre ouverture sur le monde  un repli identitaire, qui nous met justement , au banc du monde.  Mais en  intégrant le monde, porteurs d'une  nouvelle forme de post- modernité, une post- modernité tunisienne, sur fond d'une conciliation /réconciliation. Entre la nécessité d'être et la nécessité d'avoir. Entre le besoin de sauvegarder notre authenticité arabo-islamique et d'assumer tous nos héritages  berbères et afro –méditerranéens  et  le besoin de nous ouvrir  sur les droits, les libertés   les valeurs et le  progrès des connaissances,  à l'échelle de l'universel,  sur la tolérance de l'Autre,  sur l'échange et la solidarité avec l'Autre.     
 
Aux 'Souvarine' et 'apprentis-Souvarine', qui sont hélas! tout, sauf absents de la vie politique politique tunisienne en cette fin de transition, nous dirons tout le contraire de ce que le chef révolutionnaire dans le roman de Zola a dit à son locuteur qui l'interpelait : '' Tous les raisonnements sur l'avenir,  loin  d'être  criminels sont, au contraire, salutaires, parce  qu'ils  empêchent justement la destruction pure et orientent  la marche de la révolution vers le bien, le mieux-être et le progrès''
 
Abou Sami
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1 Commentaire
Les Commentaires
farhat - 28-07-2014 15:27

Je dirais qu il faut cesser de raisonner en prenant appui sur le passe comme le font Marzougui et ses apprentis revolutionnaires.les propos de Zola datent de 2 siecles et s inscrivent dans une histoire,une geographie et une culture qui n ont rien a voir avec la Tunisie et les pays arabes de 2014.La "culture revolutionnaire" des "printemps arabes" tourne a la farce ideologique et philosophique.Les freres musulmans et Daesh ne sont ni Souvarine ni Etienne et veulent retourner beaucoup plus loin dans l Histoire que Zola.Au 21 ieme siecle les seules revolutions capables de generer un ordre nouveau sont celles qui ne detruisent pas mais rebatissent.

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