News - 23.05.2017

Quelles nouvelles générations de Tunisiens en Italie sommes-nous en train de préparer ?

Communauté Tunisienne en Italie

Dès que l’on parle de Tunisiens en Italie tout le monde pense aux clandestins qui sont aux alentours de 70 000 selon des sources officieuses ou aux 2000 jeunes qui croupissent dans les prisons Italiennes (Leaders N 71 Avril 2017) et qui sont malheureusement les plus exposés aux risques de radicalisation, de marginalisation et leurs conséquences dont l’exemple le plus récent est celui du terroriste Amri. Pourtant les Tunisiens en Italie sont loin d’être que ces clichés réducteurs.

Le rapport annuel du ministère du travail et politiques sociales Italien du mois de décembre 2016(www.integrazionemigranti.gov.it/.../PaesiComunitari...COMUNITA_2016/RC_TUNIS) indique que les Tunisiens séjournant régulièrement en Italie à la date de décembre 2016 sont au nombre de 118.821 dont 62,6% d’hommes et 37,4% de femmes dont 37.072 sont mineurs. Ceci sans parler des 5000 tunisiens qui ont obtenu la nationalité.

Si on analyse la situation de près, on s’aperçoit que 60% d'entre eux sont répartis entre les régions Emila Romagna (Bologne), Lombardie (Milan) et Sicile. La majeure partie de la main d’œuvre tunisienne est dans le secteur industriel au nord et dans le secteur agricole et de la pêche au sud (Sicile) ce qui est la spécificité de l’immigration en Italie à la différence d’autres pays européens.
L’âge moyen est de 31 ans, témoignant de la capacité de travail de ces jeunes immigrés mais si ce chiffre est bas c’est aussi du fait du nombre élevé des mineurs, qui à mon avis devraient bénéficier d’une attention particulière. En effet, ces derniers constituent à eux seuls un sujet à part car ces mineurs représentent le futur aussi bien pour la Tunisie que pour l’Italie, ces jeunes nés ou ayant grandi en Italie vont difficilement revenir en Tunisie à court ou à moyen termes, ce qui nous oblige à leur offrir une bonne formation scolaire, universitaire et par conséquent une adéquate intégration en Italie et de représenter dignement la Tunisie.

Il y a 37.072 mineurs tunisiens en Italie mais seuls 18.122 sont inscrits dans des écoles primaires et secondaires (887 aux universités). On est en droit de s’inquiéter du sort des 18.950 autres ? L’étude dit qu’une partie est inscrite aux écoles tunisiennes en Italie et d’autres aux écoles en Tunisie mais on ne dispose pas de chiffres précises. Néanmoins, il est certain que c’est une faible proportion des 18 950 jeunes non scolarisés. Où sont donc les autres mineurs tunisiens non scolarisés ? Sachant que la loi italienne ne permet pas aux mineurs de moins de 16 ans de travailler, on est en droit d’être inquiet. Abandonnés à eux mêmes, ces mineurs deviennent des proies faciles pour tous les prédateurs de tous bords, drogues, prison, radicalisation... C’est à mon avis un sujet qui nécessite des actions urgentes.
Quelles nouvelles générations de Tunisiens en Italie sommes-nous en train de préparer ? La question est posée aussi aux gouvernements Italiens. Actuellement et si rien ne change on est en train d’hypothéquer l’avenir de beaucoup de jeunes. Au mieux, une génération destinée à travailler comme saisonniers dans les champs de tomates, une génération qui ne pourra pas s’assurer une vie décente, qui ne sera pas armée pour réaliser ces rêves qui les ont poussés ou poussé leurs parents à braver tous les dangers et accepter l’exil. Et le problème ne pourra que s’aggraver car le taux d’occupation des adultes en Italie est actuellement de 48,6% et le taux de chômage de 23,5% mais ce taux, j’en suis persuadé, ira en augmentant à cause de la crise économique en Europe. C’est ici que réside notre défit pour les futures générations de tunisiens en Italie.

Si un non initié comme moi examine l’aspect financier, il observe avec effroi que les Tunisiens d’Italie n’ont en 2015 envoyé que 53,2 Millions d’euros en Tunisie ! Ce chiffre est à comparer aux 435,3 millions que les bengalais en Italie (ils sont presque aussi nombreux que les tunisiens) ont envoyé !!! Un bengalais en Italie envoi à sa famille huit fois plus d’argent qu’un Tunisien !! Comment expliquer cet écart ? Est-ce à cause de la complexité du système bancaire Tunisien qui décourage les meilleures volontés ? Il est certain que ce système est à revoir, mais ce n’est certainement pas l’unique raison, je laisse aux spécialistes de tous bords le loisir d’interpréter ces écarts.

Ce qui incontestable c’est que la population tunisienne en Italie est très attachée à la Mère-Patrie, mais la Mère Patrie ne doit pas non plus oublier ses enfants à l’étranger. Penser à faciliter les formalités administratives, à alléger la bureaucratie, éviter les tracasseries, pour ne dire autre chose douanières, assurer un bon service sans de longues files d’attente, faciliter les formalités bancaires, encourager l’enseignement de notre langue maternelle à nos enfants, les encourager à revenir passer les vacances au pays dans des conditions agréables autant de mesures faciles à mettre en place, autant de messages positifs qui peuvent rapporter gros à la Tunisie.

Docteur Mohamed Adel Chehida
Médecin Anesthésiste Réanimateur
 

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