Opinions - 16.08.2016

Habib Touhami: Les maladies infantiles de la gauche tunisienne

Habib Touhami: Les maladies infantiles de la gauche tunisienne

La gauche tunisienne se meurt lentement de son penchant atavique à l’émiettement et à l’intellectualisme. Divisée en chapelles, minée par le culte du dogme et parfois même par celui de la personnalité, incapable de comprendre, comme la droite tunisienne mais avec une inversion des primautés, que l’économique et le social forment un tout indissociable, la gauche tunisienne ne cesse de tourner le dos à sa substance et à sa raison d’être.

La gauche tunisienne se rassemble comme toutes les gauches autour de la critique de l’ordre social établi et du souci d’une plus grande justice sociale et économique, mais jamais elle n’a inscrit son projet et son combat dans cette perspective. Elle se contente de jeter sur la place publique des schémas et des propositions trahissant une méconnaissance affligeante des dossiers et une ignorance inacceptable des interrelations entre l’économique et le social. Aussi est-elle perçue, à l’intérieur et à l’extérieur, comme une force protestataire de nuisance et non pas comme une force susceptible d’exercer le pouvoir un jour.

Cette question n’intéresse pas que la gauche tunisienne. Pour qu’un régime politique soit pleinement démocratique, il doit remplir concomitamment trois conditions: institutions démocratiques, élections libres, possibilité d’alternance. La troisième condition n’est pas remplie en Tunisie. Primo parce que les partis politiques conservateurs et du centre se rejoignent pour ne pas mettre en cause l’ordre social et les fondamentaux d’une stratégie du développement économique montrant limites et essoufflement. Secundo parce que la gauche ne se pose pas à l’heure actuelle comme une réelle solution de rechange, bien au contraire. En militant activement pour la proportionnelle de liste aux élections législatives au lieu d’un système majoritaire uninominal à deux tours, rassembleur et clarificateur par définition, la gauche a sacrifié un avenir possible à un présent éphémère et favorisé, malgré elle, le maintien à la tête du pays d’une majorité politique conservatrice et frileuse.

Pour la gauche tunisienne, le temps a fait son œuvre. Le lyrisme d’antan a laissé la place au désenchantement, la générosité à l’égoïsme, la fraternité au sectarisme. Ses rangs se sont clairsemés sauf de quelques irréductibles au comportement d’assiégés. Certains ont quitté le navire pour se refugier «opportunément» dans la défense des droits de l’homme, d’autres se sont embourgeoisés au point de devenir plus réactionnaires que les réactionnaires qu’ils abhorraient jadis, alors que certains, et non des moindres, ont servi de chiens de garde au régime de Ben Ali. N’empêche, la gauche tunisienne se doit à elle-même et doit au pays une résurrection morale, idéologique et politique salvatrice. C’est à ce prix qu’elle pourrait consolider la démocratie, consacrer l’alternance au pouvoir  et jouer un rôle dans l’avenir du pays. A quand donc les assises de l’unité, du progrès et de la justice sociale en Tunisie?

Habib Touhami

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3 Commentaires
Les Commentaires
Touhami Bennour - 18-08-2016 00:44

C´est vrai qu´on se pose ce problème de la gauche, on ne peut se passer d´une société contradictoire comportant une partie de la population qui mange trois repas par jour au moins et une autre partie qui lutte de tous ses moyens rien que pour se procurer le petit déjeuner; sans parler des autres besoins, logement, santé et environnement, enseignement, jours fériés et retraite etc.. Mais quelle gauche? il faut se rendre à l'évidence que la gauche du temps de la guerre froide est révolue. Alors qui fera partie de la gauche dans l ´avenir? moi je vois que l´ UGTT a un grand rôle á jouer et il faut le lui rappeler et insister pour que l´UGTT joue son rôle. Après l´effondrement du camp socialiste. il faudrait créer une autre gauche ou elle se créera d´elle même en regardant comment "l´Ordre social établi" fonctionne. Il faut créer une véritable classe ouvrière,, ancrée dans l´idée du travaille et la joie de survivre. En effet l´ élite actuelle, gauche et droite, est habitué à un comportement social particulier, qui est mis sur la tête d´ailleurs, "la joie de vivre". Pour être réaliste il nous faut une gauche qui crée un autre ordre social, en le mettant sur les pieds. C´est le moment qui importe le plus. L´avenir personne ne le connait, et surtout pas la société finale, à savoir la société sans classes, ou le communisme.

salah zeghidi - 21-08-2016 03:37

Est ce que Si Habib Touhami connait suffisamment la gauche tunisienne , sa composition , ses différents courants , son histoire pour pouvoir en parler , la juger ou en faire un bilan ??? Certainement non !!! .....Que la gauche ait des problèmes majeurs , à la fois au niveau de ses grandes orientations ou au niveau de sa composition et de ses divisions , la gauche le reconnait et le vit .....Des militants de gauche (et qui , contrairement à Si Habib Touhami , savent de quoi ils parlent !) le disent et l'écrivent assez souvent ....je poserai des questions à Si Touhami : QUI , en TUNISIE , durant ces trente ou quarante dernières années , a combattu la dictature ? Qui a combattu le Parti Unique , les élections / bidon , la mainmise sur les médias , sur la justice , sur les organisations appelées nationales , notamment L'UGTT et L'UGET ? Qui a dénoncé l'alignement sur la politique américaine ? Qui (si on exclut les islamistes qui se battaient pour un agenda très particulier!) a été victime d'une répression permanente , d'une torture systématique , de procès d'opinion scandaleux avec des condamnations allant parfois jusqu'à 14 ans de prison ? POUR QUI A ETE CREEE LA SINISTRE COUR DE SURETE DE L'ETAT EN JUILLET1968 ? QUI A OSE , POUR LA PREMIERE FOIS DEPUIS 1956 , se présenter à une élection PRESIDENTIELLE contre le PRESIDENT / DICTATEUR ,? Qui , en 2004, a manifesté dans les rues de Tunis , de Sfax , de Gafsa et d'ailleurs , en criant face à une police aux aguets = " NE VOTEZ PAS BEN ALI , VOTEZ M'HAMED ALI HALOUANI !" " 50 ans de pouvopir destourien , çà suffit!"........Qui est derrière l'apparition dans les années 80 d'un mouvement féministe tunisien se battant.pour la sauvegarde des acquis (que les sirènes islamistes commençaient déjà à remettre en cause ) et pour l'égalité totale entre les femmes et les hommes ?Qui est derrière l'apparition et le développement d'une culture démocratique et progressiste , notamment l'explosion du théatre d'avant garde qui a triomphé avec Fadhel Jaibi , Fadhel Jaziri , Jalila Baccar , Jalila Ben Ammar , Taoufik Jebali , Zeyneb Farhat , pour ne citer que ceux-là !........Vous préférez "sélectionner" quelques très rares rares personnalités de gauche qui ont répondu aux appels de Ben ALI , et oublier (et surtout faire oublier) LES MILLIERS , oui Mr Touhami , LES MILLIERS DE MILITANTS ET DE MILITANTES DE GAUCHE qui sous le régne de Ben Ali comme sous celui de Bourguiba n'ont connu que les prisons , la torture , les procès , les interdictions de sortie du territoire , l'embrigadement forcé et punitif dans l'armée , les privations de travail et les licenciements abusifs !!!!........La gauche , Mr Touhami , a besoin de se reconstruire , de se rénover et de s'unir !!!!...mais sachez , Mr Touhami , QUE LA GAUCHE N'EST NULLEMENT OBNUBILEE PAR L'ACCESSION AU POUVOIR.....Dans l'état où se trouve le pays , dans la situation de la gauche aujourd'hui , dans le rapport de forces politique actuel , la GAUCHE A D'AUTRES CHATS A FOUETTER QUE DE SIEGER AU GVT !!!...Dans tout démocratyie qui se respecte , le role d'une véritable opposition est ESSENTIEL ! Le probleme aujourd'hui , pour nous hommes et femmes de gauche , Mr Touhami , ce n'est pas d'occuper un siège ou deux dans un gvt de la droite ultralibérale et islamiste -nous n'avons rien à y faire- c'est de RENDRE LA GAUCHE CAPABLE DE JOUER UN ROLE ESSENTIELDANS LA VIE POLITIQUE DU PAYS ET DE CONSTITUER UNE VERITABLE OPPOSITION DEMOCRATIQUE ET PROGRESSISTE AU GVT NIDA / NAHDHA décoré de quelques intrus qui finiront par être "intégrés" , soit par les intégristes soit par Nida , soit comme leurs prédésesseurs au gvt Essid , usés puis rejetés .......Une question , Mr Touhami : Où étiez vous dans les années , disons : 1985 /2011 ?...une deuxième question , Mr Touhami = Dans votre texte ci-dessus , vous parlez de droite "conservatrice" de manière générale .....Nahdha (dont vous ne dites pas un traitre mot!) est elle pour vous simplement "un Parti Conservateur" ? AKAHOU ?????

Touhami Bennour - 26-08-2016 03:42

A Mr. Salah. je suis aussi d´accord c´est pourquoi ca m´interesse. Ce que vous dites est exact. Mais pourquoi l´URSS est tombé? parce que dans le Marxisme la politique était teleologique, on était sûr de passer par le socialisme, Marx l´a dit parait-il: la fases de l´histoire sont connues. l´esclavagisme,le feodalisme et le capitalisme, alors pourquoi s´y approfondire, notre rôle viendra de toute facon. C´est la question. Il faut abandonner la "teleologie" rien est sûr, il ´n´y a pas de fase, il y en a eu? où? tous les partis, fransais, tunisien. sovietique et autres se sont tromper á cause de cette ideologie messianique. Cela na rien á voir avec la bonne volonté des militants et dirigeants. Il s´agit de comment voir le monde. Je crois que Marx disait lui-même que le monde serait comme on le ferait et non comme il se ferait.

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