News - 27.01.2016

La Tunisie en est concernée : Comment l’UNESCO se mobilise pour la sécurité des journalistes

La Tunisie en est concernée : Comment l’UNESCO se mobilise pour la sécurité des journalistes

Les évènements ne cessent de souligner l’ampleur des dangers qu’encourent les journalistes dans la couverture des conflits et affrontements. Comment y parer ? L’UNESCO y consacre une conférence qui se tiendra dès le 5 février prochain à Paris. Mehdi Benchelah, Senior Project Officer à la Division Liberté d’expression et soutien aux medias répond aux questions de Leaders.

A quelles recommandations concrètes pensez-vous aboutir à l'issue de cette conférence ?

L’objectif de cette conférence intitulée « Les médias se mobilisent pour la sécurité des journalistes », est de réunir des décideurs d’organes de presse (propriétaires, directeurs, rédacteurs en chef) du monde entier, ainsi que des représentants des Etats membres de l’Organisation, dans le but de favoriser un dialogue et de trouver des solutions concrètes pour améliorer la sécurité des professionnels des médias et d’œuvrer à la fin de l’impunité pour les crimes commis contre des journalistes. 
La conférence, qui regroupera plus de 200 participants, commencera par deux sessions plénières qui analyseront les défis et les réponses que l’industrie des médias peut apporter aux dangers auxquels font face les professionnels des médias. Elles seront suivies par trois tables rondes sur des thématiques spécifiques. La première table ronde portera sur les bonnes pratiques des salles de rédaction pour renforcer la sécurité des journalistes. La seconde portera sur les radios communautaires et les médias locaux et réunira des participants d’Afrique, Asie, d’Amérique latine et du monde arabe. Il est très important de prendre en compte les risques auxquels font face ce type de médias. En effet, plus de 95% des journalistes tués dans le monde depuis dix ans sont des journalistes et des correspondants locaux. La troisième table ronde sera consacrée aux moyens de renforcer la sécurité des pigistes et des producteurs de médias sociaux. 
Ainsi, cette conférence va permettre d’une part, un dialogue entre les décideurs des médias et les représentants des Etats membres et favorisera, d’autre part, un échange de bonnes pratiques sur les protocoles de sécurité pour les salles de rédaction, les meilleures formations pour améliorer la sécurité physique, psychologique et numérique des journalistes, mais aussi sur les dernières innovations en matière de sécurité, par exemple des applications ou des assistances sécurisées en ligne.
Le lendemain de la conférence, le 6 février, l’Association mondiale des journaux et des éditeurs de médias d’information (WAN-IFRA), la Fédération internationale des journalistes (FIJ), la Fondation internationale des femmes dans les médias (IWMF) et 25 représentants de l’industrie des médias organiseront une rencontre dans le but de développer et proposer des actions pour renforcer la sécurité des journalistes et mettre fin à l’impunité.

Comment les médias émergents et les petites entreprises de presse peuvent protéger leurs journalistes et équipes techniques ?

Il est très important pour les médias locaux, qui comptent le plus de journalistes victimes d’attaques, de se mobiliser sur les questions de sécurité et de lutte contre l’impunité. Ces médias doivent travailler avec les associations de défense de la liberté d’expression et les agences des Nations Unies qui disposent de ressources pour améliorer la sécurité des journalistes. Il peut s’agir de guides pour la sécurité des journalistes comme celui produit par Reporters sans frontières et l’UNESCO ou de programme de formations spécialisées. Les journalistes et les techniciens, en particulier ceux qui se rendent sur des zones dangereuses, devraient tous faire une formation aux premiers secours, il s’agit du minimum en matière de sécurité. Il existe aussi des ressources en ligne très complètes, disponibles en plusieurs langues. L’échange d’information est à cet égard fondamentale.
Enfin, il est très important d’avoir un dialogue constant avec les autorités nationales, en particulier le bureau du premier Ministre, le ministère de l’Intérieur et le ministère de la Justice, pour que ces institutions assurent la sécurité des journalistes et conduisent des enquêtes pour traduire en justice les responsables des attaques contre les professionnels des médias. Enfin, les médias ne doivent pas hésiter à produire des articles et mener des enquêtes journalistiques sur les cas de crimes contre des journalistes afin d’en informer le public et que ces cas ne tombent pas dans l’oubli.

Quels sont les dispositifs concrets que les Etats doivent mettre en place ?

Les Etats sont responsables du maintien de l’ordre public, donc de la sécurité des citoyens et en particulier des journalistes. Les Etats doivent par exemple former les forces de sécurité pour que ces dernières comprennent mieux le rôle et la place des journalistes dans une société démocratique et assurent de manière efficace leur protection. Un projet de formation des forces de sécurité sur la liberté d’expression a été initié en Tunisie, en 2013, en coopération avec le ministère de l’Intérieur tunisien. 
 
En fonction de la gravité des menaces, l’Etat doit mettre en place des mécanismes de protection des journalistes et assurer leur protection physique. Il est très important que l’Etat poursuive les responsables des attaques et crimes contre les professionnels des médias et mène les enquêtes à leur terme. Pour cela, le système judiciaire tout entier doit être mobilisé pour que les juges puissent mener des enquêtes sur les auteurs des crimes contre les journalistes et leurs commanditaires. Aujourd’hui, dans plus de neuf cas sur dix, les crimes contre les journalistes dans le monde ne sont jamais résolus. Tant qu’il y aura un sentiment d’impunité, ces crimes et ces attaques perdureront. Ceux qui visent les professionnels des médias cherchent à étouffer la liberté d’expression de tous les citoyens. De manière plus générale, il faut que l’Etat mette en place des lois garantissant les libertés fondamentales, en particulier pour protéger la liberté d’expression et la liberté de la presse, et les fasse appliquer.
 
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