Notes & Docs - 16.04.2015

Pour qui sonne le glas ?

Pour qui sonne le glas ?

4AUTRE PART?

Tout le monde était d’accord sur le fait qu’il fallait marquer les esprits, puisque l’attentat du Bardo avait porté un coup assez dur à l’équilibre social et au processus politique démocratique en Tunisie. Les terroristes sont de toute évidence aux abois et frappent un peu partout, n’importe comment. Le Maroc, l’Espagne, l’Afrique subsaharienne, la France tout dernièrement et maintenant, la Tunisie emblème même du renouveau dans le Monde arabe. Les élections avaient eu lieu à la fin de l’année 2014, déjà, sous une menace latente. Le moment choisi pour le coup du Bardo était dans un processus où le gouvernement s’installait, un gouvernement large, d’union nationale. Un moment sensible entre tous.

Le processus qui se mettait en place allait plutôt dans le bon sens. Le fait que les terroristes aient frappé le musée du Bardo, au coeur d’un secteur stratégique entre tous, celui du tourisme, a compliqué la donne. Il fallait sans doute faire quelque chose. Il y a eu, s'agissant de l’action à mener, quelques cafouillages semble-t-il, ce qui expliquerait en partie un appel à contre-manifester de la part d’Ennahdha un petit peu plus tard dans l’après-midi du 9 mars, mais qui est passé inaperçu dans l’enthousiasme général et la spontanéité de la population. Mais cela dénote qu’il n’y a pas un bloc homogène ou solidaire au sein de l’équipe dirigeante. Pourtant, ce n’est pas cela qui est important aujourd’hui. Ce qu’il est intéressant de voir aujourd’hui en Tunisie, c’est qu’il y a une faiblesse exploitable chez les terroristes, une rivalité évidente au niveau du camp djihadiste et qu’on ne met pas suffisamment en relief ni à profit, ni dans les instances de décision, ni dans les média. Et aussi le fait que le ministère de l’intérieur considère toujours, à contre-courant, que c’est AQMI, Al Qaïda au Maghreb Islamique, qui a frappé le Musée du Bardo alors que l’organisation Etat islamique l’a revendiqué. C’est plutôt cela qu’il faut retenir de l’actualité. En Tunisie, on retrouve un peu le schéma de ce qui se passe ailleurs en ce moment, notamment en Syrie, deux franchises, Al Qaïda et l’Etat islamique, qui se disputent les influences et revendiquent les mêmes actions. On est dans un moment où, pour une petite guerre de prestige entre elles, al qaïda d’un côté et l’Etat islamique de l’autre, ces deux franchises anarchistes, essaient de frapper le plus fort et le plus haut possible, pour faire parler d’elles au maximum. Ces deux organisations sont en concurrence et on pourrait exploiter cette faille pour leur porter un coup fatal. Donc avec cette vague d’attentats, on est vraiment dans une guerre de communication. C’est aussi le sens de l’attentat du Bardo. On a voulu frapper un symbole fort, un lieu public, le musée fréquenté par tout le monde, des Tunisiens et des touristes étrangers, pour faire parler de soi. C’est aussi l’intérêt de l’Etat islamique. On travers une conjonture où faire parler de soi est une montée en puissance. Et du coup l’attentat doit être perçu comme une offensive de communication de la part des franchises jihadistes. Une guerre de communication dans laquelle le gouvernement semble désemparé et tente difficilement de reprendre la main. Il annonce à cette fin, et ce, quelques heures avant cette marche, un succès important contre la mouvance jihadiste dans le nord du pays, neuf terroristes abattus dont le numéro un (1), le chef de la branche d’AQMI dans la région. Une branche qui est assez complexe, puisque cela fait à peu près depuis 2012 qu’il y a des attaques régulières contre des soldats tunisiens dans la région, un peu plus bas dans la ville de Kasserine, et dans la région du mont Chaâmbi. Coïncidence ? Un succès qui vient à point nommé pour qui sait attendre dirait-on ! Compte tenu de ce que les forces tunisiennes n’arrivaient toujours pas à déloger cette phalange terroriste qui opère et se mêle à une population paupérisée de la région. Mais c’est aussi dû au fait qu’il s’agit d’une région difficile et surtout une armée qui était marginalisée sous la dictature précédente et qui n’a pas encore les capacités d’intervenir de manière satisfaisante. D'autre part, ce n’est pas seulement la révolution qui a affaibli l’Etat, mais c’est toute la période précédente de la dictature où l’Etat était mise en coupe réglée par la famille de Ben Ali pour servir les intérêts de la famille. C’est ce qui a conduit à une grande difficulté structurelle comme celle au niveau du ministère de l’intérieur, qui était divisé, avec d’un côté le rôle de parti pris de la famille et de l’autre des policiers qui voulaient un peu plus remplir leur rôle. C’était une situation très compliquée de schizophrénie institutionnelle. La révolution est arrivée après et on a limogé un certain nombre de gens qui avaient de l’expérience en termes de renseignement, en termes de direction anti-terroriste, en termes d’action. Pendant deux ans, il y a eu un certain flou qui s’est installé avec de plus la question de la liberté d’expression qui a émergé  et du coup des franges djihadistes occultes, qui sommeillaient au sein de notre société, vont s’éveiller car ils pouvaient alors s’exprimer. D’autres vont faire de la prédication. Et puis d’un coup, on a assisté à la création et l’essor de l’Etat islamique en Syrie et en Irak qui va s’ajouter à tout cela. Ainsi, on est arrivé aujourd’hui à un climat qui est tendu mais non désespéré. Cependant, il est indéniable, encore une fois, que l’intérêt des terroristes pour cet attentat c’est une offensive de communication, pour une question de prestige et d’orgueil.

Cette marche à Tunis devait, elle aussi, être une réponse de communication forte. Beaucoup de Tunisiens dans la rue, tout le monde a appelé à une mobilisation pour cette manifestation. On a alors pu constater un déploiement important des forces de sécurité, lors de cette marche, comme si elles avaient sauté sur l’occasion d’une action servant tout bonnement de faire-valoir à la police d’Etat. La police qui voulait dire ‘’voyez comme nous sommes efficaces, comme nous savons bien vous protéger !’’. Mais là encore, ils ne font montre d’une utilité que comme moyen de gouvernement. Grâce à eux, le pouvoir en place peut dire : «il y a des fous qui menacent votre tranquillité, votre sécurité, mais nous sommes là et nous veillons ». Ce qui est en partie vrai, il faut l’admettre.

Les estimations à cette occasion chiffraient à plusieurs dizaines de milliers les participants qui étaient venus défendre l’exemple tunisien, la TUNISIE qui a lancé en 2011, contre toute attente, le printemps arabe avec sa révolution de Jasmin démontrant encore une fois le rôle de premier plan dans le monde Arabe de notre pays. Un processus assez unique dans la région, il faut le dire, un processus démocratique pluraliste. Mais cela pose une fois de plus, la question de l’opposition, son effectivité, une très faible opposition comme contre-pouvoir. Il y a eu beaucoup de choses qui n’ont pas été faites et personne pour le signaler. C’est important d’y revenir parce qu’autant la population a été au rendez-vous, au rendez-vous des votes, elle s’est rendue aux urnes plusieurs fois, a vraiment joué le jeu de la démocratie, s’est impliquée dans cette démocratie, au niveau de la société civile, au niveau des centaines d’associations qui sont nées, beaucoup d’initiatives ; autant l’horizon politique est devenu beaucoup plus compliqué et incertain. Toujours pas de justice transitionnelle effective. Une loi a bien été votée, mais très peu de mesures ont été mises en place et déjà on parle de la remettre en question pour un processus de réconciliation nationale. On n’a pas du tout tiré les leçons ni fait le bilan des années passées. Il n’y a pas eu non plus de version officielle de tout ce qui s’est passé durant la révolution, notamment le 14 janvier 2011, le jour où le dictateur avec la famille est parti. Donc il y a bien une population qui est vraiment là quand il faut, mais il y a aussi un ton politique et une classe politique qui ne joue toujours pas son rôle, mis à part le vote de la constitution qui là, pour le coup, a été un plus pour la Tunisie. Sur ce point, il est temps que l’histoire de la Tunisie soit réécrite sur la base de la réalité et de l’authenticité des faits et non pas selon une version officiellement édulcorée.

Que peut-on attendre du déplacement des chefs d’Etat ? C’est de l’ordre du symbole avec ses paradoxes. Elle apporte une certaine image de solidarité de la société internationale. L’important est surtout de considérer que tous les pays arabes, ne constituent pas une sorte de magma émanant du Maghreb, du Moyen-Orient, des endroits indéfinis où l’islam radical opèrerait pour menacer la démocratie un peu partout. L’Islam radical ce n’est pas l’islam. Aujourd’hui on a des cadres nationaux qui sont très différents et qu’on le veuille ou non, de ce point de vue la Tunisie avance et constitue cet espoir de jours meilleurs pour sa population et pour le monde. Cela, même si la Tunisie est soumise à des contraintes importantes et même si le terrorisme, la guerre en Libye qui est à côté, la frontière algérienne qui est assez poreuse accroissent les difficultés de l’armée pour manoeuvrer et la sécurité nationale de s’installer. Il est important de montrer que l’on est avec la Tunisie corps et âme, que l’on est avec son exécutif aussi, pour construire un avenir démocratique pour nos générations futures, nos enfants, pour ne pas faire n’importe quoi. Il y a cependant quelques fausses notes, comme avec par exemple la loi anti-terroriste qui va être votée dans les prochaines semaines. C’est aussi quelque chose sur lequel la Tunisie a pris du retard. On est toujours sous l’empire d’une loi antiterroriste de 2003 du régime précédent. Il faut renouveler tout cela. Elle a pris du retard à cause d’une certaine ambiguïté et de l’absence d’une réelle stratégie. On ne sait pas comment commencer dans ce domaine, d’autant qu’en la matière il n’y a pas de mode d’emploi et que les dérives sont très faciles. A qui la faute ? Est-ce si important ? Ennahdha a été au pouvoir de 2012 à 2014. Ils n’ont certes pas eu un bilan très positif, mais ils ont eux-mêmes choisi de quitter le pouvoir, considérant qu’il fallait de nouvelles élections et qu’il fallait sortir de cette période de crise politique après le vote de la constitution. Donc eux-mêmes ont évolué durant ces deux années. Mais il faut surtout considérer que nous sommes dans un système de partis politiques qui ne savent pas gérer un pays, comme l’ont prouvées ces quatre années passées, parce qu’ils n’ont pas appris à le faire, parce qu’ils n’ont pas non plus les cadres pour le faire. C’est le cas d’Ennahdha mais aussi de tous les autres partis, comme celui qui a remporté les élections et qui est au pouvoir. Il faut rappeler que le président de la république actuel a été premier ministre de la Tunisie de mars 2011 à décembre 2011. Il a eu l’opportunité d’initier des réformes. Il ne l’a pas fait. Il y a donc une coresponsabilité de la classe politique toute entière aujourd’hui sur les retards, les hésitations et les tergiversations de l’Etat. Incompétence à gouverner, décisions lancées comme on jette
des pierres, de façon lapidaire, sans même avoir appris à viser comme il se devrait.

Pour qui sonne le glas?

Nous devons voir le monde tel qu’il est et non comme nous voudrions qu’il soit. Nous vivons et opérons dans des zones d’ombre et il nous faut l’admettre. Personne, homme ou femme n’est un ilot isolé et indépendant et chacune de leurs actions a des conséquences sur l’ensemble. Quand nous entendons le glas, il ne faut jamais demander pour qui il sonne. Chacun de nous est en tous et tous sont en chacun de nous, quand on raisonne en population. Nous n’atteindrons le bonheur qu’à ce prix. Quand nous entendons le glas, ne demandons pas pour qui il sonne. Quand un homme s’éteint ou qu’une femme agonise, que ce soit un ami ou un inconnu, quand nous entendons le glas, ne demandons jamais pour qui il sonne ; car c’est pour nous tous qu’il sonne, nous comme un tout issu de la multitude. Je n’ai pas de mots pour décrire ce que je ressens devant l’horreur des faits de ces derniers jours. Je n’arrive pas à traduire la souffrance qui m’étreint surtout devant la froideur de ceux qui ont notre destin dans leurs mains et qui sont capables de sacrifier tant de choses pour satisfaire leurs ambitions, qu’elles soient politiques ou de simple promotion sociale. Nous avons eu droit à tant de mensonges de la part de dirigeants sans scrupule qui nous gouvernent que l’on n’arrive plus à distinguer le vrai du faux. Nos représentants nous mentent impunément et rien ne les arrête, pas même le meurtre de sang froid de personnes innocentes, 24 humains pour être exact, du moins selon les chiffres annoncés, mais sait-on jamais ?

Nous avons lutté pour la Démocratie, sans même nous demander quelle démocratie ? Sans nous préoccuper de ce qu’elle se proposait de faire de notre monde. Chaque conflit, chaque mort d’êtres humains font surgir ces questions, font de nouveau sonner le glas. De quel droit mettre fin à des vies ? Est-ce pour attirer les faveurs des divinités d’un âge d’or illusoire ou celles du socio-libéralisme ou de l’islamo-libéralisme ? Même si on pouvait répondre à cette question, on s’en poserait un tas d’autres. Par exemple se doute-t-on que c’est injuste ? Que la guerre dans toute ses formes est la plus grande des injustices et quand on regarde dans les yeux de ceux qui nous gouvernent, nous voyons les centaines de vies qui ont été éteintes comme la flamme de bougies qu’ils ont soufflées. Quels hommes sont-ils, ceux qui continuent à fabriquer des guerres et des armes pour toutes ces guerres ; ceux qui exposent les populations en premières lignes pour satisfaire des ambitions malsaines. Les victimes de cet attentat gisaient au sol ne pouvant plus se défendre. Tous morts dans la visite d’un musée. Qui aurait dit que la visite de musée était à haut risque ? Ces gens n’ont pas eu de chance, mais c’est une piètre consolation.
Ceux qui dirigent le monde n’ont jamais réfléchi à ce que la vie pouvait vraiment signifier. La vie fait partie de ces choses que l’on considère comme un dû jusqu’au jour où le contact direct avec la mort, nous rappelle qu’elle n’est qu’un prêt et comme elle peut facilement nous être ôtée. Pourquoi ? Pourquoi ces choses arrivent-elles ?

Ces fous étaient là à cause d’un discours, parce qu’on leur promettait la clef facile d’un paradis des meurtriers. Levez-vous, gouvernants de ce monde, debout et regardez à quoi ressemblent des personnes que vous avez faites mourir inutilement par négligence. Ouvrez les yeux, ces yeux brulés par les flammes du pouvoir et de l’argent. Ne peuvent-ils plus rien voir d’autre que votre cupidité et votre folie dévorante ? Néron aurait chanté dit-on en regardant Rome brûler. Et vous qu’allez-vous faire ? Danser ! Vous usez de votre pouvoir et de vos forces pour creuser le tombeau de l’humanité. Mais la tombe ne suffit pas. Il faut aussi une pierre tombale et une épitaphe. Qu’allez-vous y écrire ? Quelque chose qui dise à ceux qui plus tard viendront là, ce que signifie la Terreur dans l’absolu. Peut-être demanderaient-ils pourquoi ces gens sont morts. La seule réponse ne pourrait être qu’une autre question. Pourquoi ? Seule votre grande folie expliquerait tout.

Les systèmes politiques démocratiques devraient sélectionner les individus jugés les plus aptes à prendre les décisions, des hommes d’exception dignes de gouverner. Mais ce que l’on constate c’est qu’au contraire, ils favorisent l’ascension des médiocres. Ces systèmes détériorent gravement les relations sociales. Ils détruisent des strates présélectionnées d’une société.

La Démocratie nous a toujours été présentée comme un facteur d’égalité ultime, une source efficace de décisions faisant des miracles. Elle est censée apporter un ensemble croissant de connaissances sur les besoins réels de la société. Elle devrait être génératrice de justice envers et contre tout. Or, aucune société n’est juste ; aussi ne sont-elles pas des démocraties réelles. Ceci est vrai pour tous les systèmes juridiques du monde sans exception. Il est un axiome selon lequel tout groupe au pouvoir a tendance à se transformer en aristocratie et à ne céder la place qu’à sa propre descendance. La justice est alors une illusion et une tromperie pour les idéalistes incorrigibles. Cela est valable partout, quelle que soit la manière dont la justice est rendue. Les gouvernements, lorsqu’ils durent, tendent toujours vers des formes aristocratiques. Aucun gouvernement de l’histoire n’a échappé à ce processus et au fur et à mesure du développement de l’aristocratie, le gouvernement a de plus en plus tendance à n’agir exclusivement que dans l’intérêt de la classe dirigeante, que celle-ci soit une royauté héréditaire, une oligarchie fondée sur des empires financiers ou une bureaucratie installée.

Nous avons contribué à la recomposition du paysage politique, par l’élection de gouvernants exécuteurs et législateurs. Une coalition de frères ennemis, l’un social-libéral, l’autre islamo-libéral, en est ressortie qui a permis d’élargir la majorité politique. Celle-ci est devenue quelque chose d’informe, un hybride avec comme trait d’union entre les partenaires, un corpus idéologique conservateur libéral et comme point de désaccord, leur projet respectif de société. Ce rapprochement contre nature a dépassé la conjecture recevable du plausible et du raisonnable pour les sacrifier sur l’autel de l’immuable et l’inamovible logique de gouvernement d’union nationale. Cette alchimie a eu pour conséquence la création d’un système politique sans majorité responsable et sans opposition critique, sans identité et sans réalité. Pas de pouvoir et pas de contre-pouvoir ! Une large nébuleuse floue qui se contente d’approuver sans discuter, un système accommodant et de compromissions conciliantes. Ainsi le terrain était-il déblayé pour la mise en place des réformes insidieuses, avec pour vecteur possible d’une croissance coute que coute plus forte, une libéralisation accrue de l’économie, une nouvelle compétitivité et attractivité du produit Tunisie. Ainsi devons-nous vendre notre âme pour quelque nouveau modèle de croissance consenti par les institutions internationales de la finance et présenté comme nouveau mode de développement. Des réformes sacrifiant au dogme du libéralisme le rôle social de l’Etat plus que jamais nécessaire aujourd’hui. Chaque tendance poursuit, par ces réformes, ses propres desseins, qu’elle n’avoue pas dans le discours officiel… et pour cause !

La révision du code des investissements, de la règlementation en matière de concurrence, la refonte de la loi sur la faillite qui ont été déclarées indispensables, mais par qui ? Sur le chantier même, aucune résistance ni aucune difficulté ni contestation. En plus de cela, d’autres réformes doivent suivre, comme celles de la prévention sociale, du code du travail, de la compensation ou encore la restructuration du secteur public ainsi qu’un nouveau projet de loi portant sur le Partenariat Public – Privé. Comment envisagent-ils de faire passer la manipulation de la retraite, du contrat de travail, de la représentation syndicale et de tous les acquis sociaux ? En les intercalant certainement entre le ramadhan et les vacances d’été. Ce sont autant de réformes impopulaires par nature qui risquent de provoquer, d’abord la surprise, puis tensions et blocages dont le pays n’a vraiment pas besoin en ce moment.

De ce point de vue, chaque système juridique se croit entouré d’une sorte d’aura théologique de sainteté, d’un caractère sacro-saint. Les pouvoirs constitués, exécutif et parlementaire croient servir une nouvelle religion sacramentelle et ils ne veulent pas voir le mal qu’ils font aux fondements même de notre société et à sa cohésion. Comme pour la démocratie, nous considérons nos lois comme des sources de justice immuables. Lorsque quelque chose ne va pas dans nos sociétés, nous créons de nouvelles lois, encore et toujours. Il ne vient à l’idée de personne, jamais, d’en supprimer ni d’en désamorcer une partie dans ses effets lorsqu’elle est inadéquate. On en fabrique de nouvelles, encore et encore. Pour cela nous formons encore plus de juristes et de professionnels de la loi. Peut-être faudrait-il penser à réduire le nombre de nos lois et par la même de nos légistes. Le premier devoir d’un légiste n’est-il pas d’empêcher le choc des contraires, d’éviter les procès et litiges ou la discorde ? Lorsque nous créons de nouveaux légistes, ce devrait être dans un but spécifique, lorsque le besoin en serait ressenti. Que feraient-ils sinon de leur temps, surtout si tout le monde était en paix sans disputes, sans litiges et sans procès, en bonne harmonie. Les légistes en raison de leur nombre, entretiennent le feu sacré de la discorde. Ils font en sorte que les lois, par leurs contradictions, par les paradoxes qu’elles créent, leur permettent d’exister ; mais ce faisant, ils minent en même temps le soubassement social. Nous devrions essayer de prévoir la manière dont les lois détériorent nos sociétés au lieu de les réguler par ce souci constant d’en toujours produire. Nous devons apprendre à mépriser toute forme d’ultra légalité, lorsqu’elle se transforme en accumulation pléthorique, en justification d’un corporatisme spécialisé et devient le fief de la corporation des légistes, lesquels sont à la solde des politiques. Les communautés de spécialistes ont un esprit d’émulation et une soif de réalisations nouvelles qui finissent toujours par submerger les groupes de ce genre. En effet, si on considère qu’à réalisation nouvelle, notoriété nouvelle, on a tout expliqué. Cependant, il arrive fréquemment que la nouveauté ne soit qu’illusion dans ces communautés, qui entretiennent un système de sélection endogène admirablement calculé pour n’équilibrer rien d’autre que des pressions endogènes de nature essentiellement gratifiante. Pas de corporation sans pouvoir. Introduire une loi nouvelle dans le système juridique consiste simplement à causer la dissolution élégante de l’ancienne loi en respectant le rituel de la justice sans considération de nécessité, d’adéquation ou d’efficacité. Les gouvernements, forts de démocratie, prennent souvent la forme d’une oligarchie de type religieux du moins en apparence se pliant à ces rituels fallacieux. On détourne l’attention des bastions de résistance avérés ou probables en nous engouffrant dans une mouvance mensongère que constitue la recrudescence du terrorisme et les menaces aux frontières. Nos politiciens ont saisi la vague pour émettre l’idée d’une réconciliation nationale large et veulent balayer d’un revers de paroles la justice transitionnelle de laquelle nous attendons tous quelque chose. Coïncidence ?
Tous les systèmes sociaux disposent de structures sociales de type quasi-militaire car continuellement soumis à des attaques ou à des menaces issues de la compétition politique. La société est formée d’un certain nombre de factions rivales dont les intérêts sont sans cesse en conflit. Ce système nous martèle sans cesse le besoin d’un consensus national mais à quel prix. Est-ce celui d’un passage en force ? Les réponses viendront nécessairement dans les prochaines semaines.

On parle beaucoup de la loi antiterroriste ces derniers temps. Le texte que l’on va placer au sommet de cet empilement juridique est-il vraiment utile ? D’autant qu’il pourrait autoriser le gouvernement et les pouvoirs publics à porter atteinte aux droits et libertés des citoyens. C’est vrai qu’ils disposent du monopole de la contrainte armée, mais cela ne les autorise certainement pas à violer la vie privée, à bloquer des sites internet sans autorisation préalable du juge (comme pour la loi française), à opérer des arrestations arbitraires, à relativiser l’intégrité des domiciles et de la correspondance, à introduire une atmosphère de suspicion et la délation dans la population. Ce sont autant d’excès et de débordements possibles sur un prétexte de légalité ce qui auraient des retombées terribles, par la violation de principes essentiels de démocratie, le risque d’erreurs aux graves conséquences et altèrerait le caractère de droit de l’Etat. Est-ce pour cela que nous avons fait la révolution le 14 janvier 2011 ? Faut-il, une fois encore, faire reculer les libertés pour lutter contre le spectre du terrorisme ? Ce serait déjà une victoire du terrorisme si la guerre déclarée contre lui devait conduire à réinstaurer l’oppression et la répression dans nos murs. C’est un pas alarmant, tant il est prouvé que les mesures d’urgence, les lois d’exceptions et les entorses au droit commun finissent toujours par le contaminer dans son ensemble. On a vu l’efficacité discutable de la loi tunisienne de 2003. Aux Etats Unis aussi, la chasse aux terroristes a conduit à la paranoïa des instances de sécurité et à la suspicion de toute la population et à cet amalgame dangereux entre musulman et islamiste radical. Ce n’est pas une loi supplémentaire, qui s’inscrit dans une culture répressive en matière de droits de l’homme, qui va faire disparaître le danger. On risque de connaître les dérives de l’Etat de droit telles qu’en ont fait l’expérience les USA en 2001 ou l’Allemagne en 1998. Une telle loi présente un danger potentiel pouvant conduire à la ruine de la démocratie sous prétexte de la défendre. Au nom de la lutte contre le terrorisme, l’Etats pourrait prendre, n’importe quelle mesure jugée appropriée, telle que des interpellations à titre préventif, une inversion de la présomption d’innocence (les prévenus seraient coupables jusqu’à preuve du contraire), atteintes à la liberté de circulation, torture. Une Justice alibi serait instaurée, qui n’aurait aucune marge quant aux verdicts devant des dossiers constitués par des services dont le caractère démocratique n’est même pas concevable. La Tunisie dispose déjà d'un arsenal juridique répressif suffisant pour faire face éventuellement à de véritables actes de terrorisme et non pas au terrorisme au sens américain ou au sens de certains milieux sécuritaires tunisiens. Déjà la loi de 2003 utilisait une définition trop large du terrorisme et de l’incitation au terrorisme, et portait atteinte aux droits de la défense. De plus, c’est une loi qui avait été déclarée inconstitutionnelle à l’époque et dont la résurrection a conduit à l’arrestation, à l’incarcération et à la torture injustes de milliers de personnes au nom de la lutte anti-terroriste depuis 2012. Avec une loi comme celle que l’on prépare et qui promet d’être plus drastique que la précédente, on mettrait la société en état de siège. Nous serions tous les otages de la sécurité nationale. La difficulté est plus que jamais d’établir le bon dosage en l’état de nécessité et l’Etat de droit. Gardons-nous de voir la violence prendre le masque de l’autorité et du ‘’vouloir comprendre’’. Il ne faut pas que les armes dont nous allons équiper nos forces de sécurité servent pour asservir et aliéner, oppresser et réprimer. Que ce deviennent des armes pour guérir les opposants et dissidents et annihiler la recherche ébouriffée d’une bonne et belle démocratie pluraliste. Que ce ne soient pas des armes pour gommer définitivement tous les cris de fureur d’une population mécontente de ses élus, des cris chargés de griffes, que pourraient vouloir rogner ceux qui gouvernent dans leur inconscience. Nous savons tout cela.
Le pays s’enfonce toujours dans la récession, l’inflation, l’endettement et la faillite, faillite financière, faillite des institutions, faillite de l’économie et du social. Les diagnostics sont assénés comme des coups de bâtons à la population, comme si elle était directement responsable et les solutions sont jetées comme on se débarrasse d’un poids mort, d’une chose ennuyante ; avec un soupir.

L'opposition prisonnière de ses frustrations

L’opposition, un contre-pouvoir qui ne joue pas son rôle. On la laisse en paix car ses tenants ne sont pas libres. Prisonniers comme n’importe qui. Hors de la cage, mais dans une autre. Dans une autre qu’ils se sont forgés eux-mêmes, en grande partie d’ailleurs, sans même s’en être rendus compte. Elle est prisonnière de ses frustrations et de l’échec de ses ambitions politiques. Avec eux également, des lois, doctrines, des directives idéologiques strictes. Comme s’ils construisaient patiemment une boite à l’intérieur d’une autre boite… Leurs convictions de leur importance les aident à résister, simplement. Il leur reste un brin d’espoir à leur mesure et à leur convenance que les choses peuvent changer. Mais on ne les laisse pas en paix. On les surveille. Qu’ils se rassemblent et s’organisent en tel ou tel endroit, on les laisse faire, car alors c’est un fait acquis. Et c’est plus facile de lutter contre quelque chose de structuré, quelque chose de bien défini dans l’espace, que contre le vent. Ils ne sont pas le vent. Ils sont des blocs monolithiques, qui se forment et se créent dans cette prison qu’est la politique politicienne. On laisse faire, oui. De plus, ils ne sont pas vraiment un danger pour le système et leurs actions sporadiques ne sont que des coups d’épée dans l’eau et ne servent tout bonnement que de faire valoir à la majorité d’Etat et à son monopole de fait.

La justice est due à ceux qui la demandent, mais que le plaignant prenne garde de créer par son action une nouvelle injustice et d’imprimer un inexorable mouvement au balancier sanglant de la vengeance. Certains pensent que nous sommes allés trop loin sur la pente du légalisme : Une loi pour chaque chose et la loi au-dessus de tout. Le dogme sacré qu’un petit nombre d’élus, inspirés par on ne sait quel esprit que le concept de religion est incapable d’expliquer, avaient choisi. Celui-ci réclame l’existence d’une lente et complexe évolution en contradiction avec la survivance d’une institution aussi entachée de rigidité que la politique juridique. En fait le pouvoir représente la clé de la survie et pour avoir le pouvoir, il est nécessaire de régenter ce dont les sociétés ont besoin pour survivre : énergie, alimentation, technologie, armement, argent. Pour déclencher une guerre, rien de plus facile. Il suffit que les dirigeants donnent libre cours à leur faim latente de pouvoir et oublient que seuls les insensés recherchent le pouvoir pour lui-même. Ceux qui accèdent au pouvoir passent à l’action derrière un masque de respectabilité sensée et de légalisme raisonné. De toute manière, que leur masque soit fait d’illusions défensives ou de l’aura théologique de la loi, la guerre viendra indubitablement qu’ils en ressentent seulement le besoin.

A un autre niveau, la société internationale est en gros une confédération relativement stable et intelligible regroupant la totalité des Nations évoluées qui en avaient manifesté le souhait d’intégration. Le monde lui-même était contenu dans un espace commun aux dimensions reconnaissables. La société internationale, alors se développait d’une manière linéaire en même temps que multidirectionnelle, comme une grosse bulle de savon qui enfle régulièrement tout en se laissant porter par le vent dans une direction donnée. Mais depuis quelques années ceci est en train de changer. Les équilibres se sont modifiés, les ennemis d’hier sont devenus les alliés d’aujourd’hui. La société internationale s’est transformée. Les moindres aspects de la vie courante ont connu une accélération explosive. La force comme la terreur fanatique ont immédiatement constitué un instrument de pouvoir, qui remet tout en question. Ils impliquent l’existence d’une infinité de moyens utilisables. Ils impliquent beaucoup d’autres choses que l’on ne comprend que très imparfaitement ou pas du tout. Le juridisme est un vieux concept et à ce jour, les chercheurs juristes ne disposent d’aucune théorie satisfaisante concernant le fonctionnement de la société des Etats. Des notions telles que la relativité ou le droit, loin d’expliquer le phénomène, ne font qu’épaissir le mystère et exaspérer les tensions. Le légalisme a occasionné des effets dis rupteurs sur le plan social et même avec les juridictions présentes, on ne peut se départir d’un profond sentiment d’insécurité.

Dans la société internationale, la confiance réciproque et illimitée est une chose qui n’existe pas. Il faut toujours s’interroger, toujours manipuler. Une sorte de respect un peu réticent, c’est le maximum que chacun peut accorder ouvertement à l’autre. Ils s’associent pour survivre ou bien quand il est particulièrement évident qu’une action commune apporte des avantages à toutes les parties concernées. Mais même quand ils s’unissent, les Etats demeurent d’incorrigibles individualistes. Ils se méfient quand on leur offre quelque chose, parce que personne ne donne rien pour rien. Les relations les plus sûres et les plus durables comme les plus stables sont celles que l’on trouve là où les alvéoles de la hiérarchie sont solidement définies et occupées. Il y a alors à craindre un minimum de menaces d’en haut ou d’en bas. Les Etats ne reculent devant aucun moyen pour arriver à leurs fins : Corruption, création de discorde, espionnage de toutes les manières possibles, directes ou indirectes, assassinat, kidnapping, chantage, subversion, contrainte et pourquoi pas le terrorisme.

Les sociétés humaines, on le sait, ont de tout temps été soumises à de multiples contraintes, celles des oligarques, des autocrates ou des ploutocrates, des avides de pouvoir des différentes républiques, des majorités et minorités tyranniques, sans oublier le charme trompeur de la démocratie, des instincts profonds ou des impulsions juvéniles. Dans tous ces cas, la force gouvernante représentait aux yeux des individus concernés l’autorité immédiate.

Une majorité s’est emparée du gouvernement. Elle veut rendre égaux tous les individus par un nivellement par le bas. Cela signifie que personne ne doit surpasser en rien son voisin. L’excellence en toute chose est à prohiber ou à dissimuler. Les tyrans font tourner leur gouvernement à très grande vitesse ‘’au nom du peuple’’. Ils ont supprimé partout où la chose est possible, les lenteurs nécessaires de la bureaucratie sous prétexte d’efficience et de bonne gouvernance. Le temps de réflexion salutaire est réduit et la décision est précipitée et sa préparation bâclée. Ils ne se doutent pas qu’en fait ils agissent en vue de satisfaire leur désir inconscient de prévenir tout changement opportun. Les tyrans essaient d’enrober les populations dans une grisaille sociale uniforme. La puissante machine gouvernementale se met à tourner de plus en plus vite, entrainant avec elle tous les rouages importants de la société. Dans la même heure, des textes de lois sont conçus, adoptés et mis en application dans la précipitation. Les structures sociales changent d’aspect à une allure suicidaire. Les gens deviennent incapables de faire face à la véritable évolution réclamée par l’environnement. Ils sont, en fait paralysés. C’est l’époque de l’économie de verre, dont la fragilité est menaçante. Poussés par leur passion de l’uniformité et de l’incontestable, les tyrans se font de plus en plus autoritaires tandis que les autres deviennent plus faibles. Les administrations, les secrétariats, les ministères, sont dirigés de façon fantaisiste, au-delà de leurs attributions. De nouveaux services se créent chaque jour pour devenir les citadelles d’une nouvelle classe de dirigeants, une aristocratie dont la seule raison d’être est de maintenir l’élan de la grande roue destructrice qui sème la violence et le chaos dans tout ce qu’elle touche tout au long de sa quête futile d’un absolu idéalement uniformisé. Autant de manifestations de remous sombres qui éclatent en surface d’inconscience à la période troublée des illusions déçues. On laisse faire, on temporise ; le temps travaille pour la dictature, pour les dictateurs latents qui attendent sagement que vienne leur heure, en silence. Ils vivent, ils pensent et attendent.

Gouverner constitue un jeu et l’Homme n’est pas assez sage ou courageux pour y jouer selon les règles. Tant de dirigeants se sont succédé à la tête des pays dont le nôtre. Certains ont hérité de ce titre par le droit du sang, d’autres grâce à la résurrection d’un esprit ancien. Rois, gouverneurs ou présidents, sans cesse le schéma se modifie et se réforme. Ils pensent que c’est le sang qui importe et ils rêvent de dynasties ; ils pensent que c’est la voix du peuple qui compte et ils rêvent de dictature. D’une vie à l’autre, d’une époque à l’autre, ils évoluent et changent tandis que l’esprit du monde, des populations, demeure identique à ce qu’il a toujours été. La mort n’a sur lui pas de prise, aussi ancien que la création. L’esprit du peuple transcende toutes les dimensions, comme l’esprit qui se cache dans l’ombre de tous les dieux, esprit qui continue de s’éloigner de l’humanité même si malgré tout il ne peut s’en séparer totalement. Un nouvel âge approche où la terre promise semblera aussi inaccessible que le pays des fées. Certains gouvernants se serviront de leurs pouvoirs pour essayer de changer cette destinée, et ceux qui leur succèderont agiront de manière identique. Ils échoueront et ne gouverneront pas éternellement. Comment pourrait-il en être autrement, alors que leurs vies ne sont que de courts fragments dans l’existence du monde ? Seuls les rêves d’enfants survivent suffisamment longtemps car il est immortel tant qu’il ne s’est pas réveillé … Fragment d’éternité. Et alors, même si au réveil le monde devait changer de visage, il resterait des endroits dans sa mémoire où quelque pâle reflet lumineux de ce monde onirique éclairerait sa réalité et cette lumière ne serait pas perdue pour l’humanité aussi longtemps que des hommes garderaient une âme d’enfant et chercheraient le réconfort sur cette terre sacrée.
Nous vivons sur le Territoire parce que nous y sommes nés. Nous ne connaissons rien de mieux. C’est lui qui nous a fait tels que nous sommes. Mais aujourd’hui nous faisons le territoire tel que nous le voulons, docile et servile, à l’usage de l’Homme. L’enfant qui refuse de cheminer dans les traces du père est la révélation de la suprême capacité de l’Homme.il n’a pas à être ce qu’a été son père. Il n’a pas à obéir aveuglément aux règles de son père ni même à croire tout ce en quoi il croyait. En tant qu’individu, sa force est de pouvoir faire ses propres choix quant à ce qu’il croit et ce qu’il ne croit pas, quant à ce qu’il doit être et ce qu’il ne doit pas être. Toutes les révoltes sont ordinaires et sont faites sur le même moule. Leur principe moteur est le besoin de pouvoir personnel. Tous les révolutionnaires côtoient le pouvoir.

La télévision, un instrument de «crétinisation»


La télévision est un moyen stratégique utilisé par le pouvoir pour occuper les esprits, elle stimule les oppositions et engagements de la population pour des causes futiles comme les jeux télévisés, le monde du spectacle, la télé-réalité, le télé-achat et surtout le sport. Les plateaux de télévision servent n’importe quoi au public, de faux débats au cours desquels un groupe de personnes se disputent et se traitent de tous les noms d’oiseaux sans qu’il n’en ressorte même une ébauche de solution au problème posé. On cherche l’audimat et le pourcentage d’écoute dans les tranches horaires entre le fromage et le dessert et on ne veut pas faire penser. L’essentiel est occulté et permet à ceux qui en détiennent les rennes de faire pratiquement ce qu’ils veulent sans souci.

La télévision a déjà été un instrument de manipulation des masses sous l’ancien régime en Tunisie. Elle empêchait de penser politique et de faire valoir une quelconque opinion. Et tout porte à croire que cela continue maintenant avec pour différence, un habillage de liberté d’expression et le musèlement des indésirables ou de ceux qui s’écarteraient des sentiers qu’on leur a battu. On empêche la contestation et les oppositions sous couvert d’union nationale. L’essentiel est noyé dans un flot de bêtises ou une montagne d’évènements spectaculaires sans lendemains pour en diminuer l’importance et en réduire l’impact. Ainsi on vise à amenuiser le discernement du spectateur et à entrainer l’adhésion irréfléchie de l’opinion publique. La télévision est le véhicule du mensonge d’Etat, du mensonge politique au profit d’objectifs personnels et des ambitions de quelques-uns qui par un revers de l’adversité ont acquis le pouvoir de gouverner le pays dans une opportune alternance démocratique à laquelle ils ne croient absolument pas et qui ne sont pas disposés à le quitter. Ils s’isolent dans un discours à double sens. Les mots sont ceux que tout le monde veut entendre, mais ils ont un sens différent, un sens caché que seuls des initiés peuvent connaître. Quel que soit ce qui se passera, ils sont prêts. Ils sont à l’affut d’un prétexte, qui servirait d’alibi, puisque celui de la transition est périmé. C’est une période troublée, troublante, au cours de laquelle l’esprit de la démocratie et de la conscience balancent dangereusement sur un fil truqué par avance, attendant qu’on les dévore, qu’on les enfourne avec plus ou moins de bonheur-malheur dans quelque moule à cuire l’animal social.

La musique d’un peuple a des prolongements subtils dans la conscience des individus et peut influencer la nature profonde d’une société. La musique et son rythme s’imposent et se substituent à l’attention consciente, définissant un périmètre à l’intérieur duquel la conscience ainsi subjuguée peut opérer. Maîtriser la musique, par conséquent et on disposera d’un instrument puissant pour modeler les sociétés.
Les moyens de prolongation de l’existence des puissants constituent une menace analogue à celle historiquement posée par la domination d’une classe bureaucratique acharnée à se perpétuer. Les prérogatives de l’immortalité historique sont assumées et chaque instant qui passe amène un peu plus de pouvoir, pouvoir auréolé d’un limbe quasi-mystique : celui de l’intouchable loi, du droit divin, de la destinée innée du chef.

Dans les systèmes sociaux fermés, les questions sont des ennemies car les questions explosent ! Les réponses bondissent comme un troupeau apeuré noircissant le ciel de ses souvenirs. La classe politique tunisienne est âgée et orpheline puisque la génération qui devrait lui succéder n’est pas formée. C’est le résultat de l’accaparement patrimonial du pouvoir dictatorial, d’une monocratie pérenne. Le pouvoir trop longtemps exercé par un seul, dans un cadre restreint, s’éloigne inévitablement des exigences d’une évolution politique naturelle pour un processus auquel il ne peut s’adapter. Les dirigeants en place convaincus d’une forme d’immortalité deviennent de plus en plus paranoïaques, soupçonneux de toute nouveauté dictée par l’adaptation créatrice au changement. Ils ne cherchent plus qu’à protéger peureusement leur pouvoir personnel et pour éviter des risques imaginaires qui les terrorisent, mènent aveuglément leurs peuples à la destruction.
Un système où l’exercice du pouvoir n’est pas une fonction mais un patrimoine personnel, fait surgir à chaque génération des opposants issus de frustrations et d’un certain accablement. Ils ne sont à craindre que quand on cherche à les éliminer car ils deviennent extrémistes et se radicalisent puisqu’ils se sentent exclus de la vie sociale même. Les radicaux ont des vues trop simplistes et c’est leur plus grande faiblesse. Pour eux c’est blanc ou c’est noir, bien ou mal, ami ou ennemi. Ils abordent toutes les questions de manière dichotomique, même les plus complexes ce qui fraye la voie au chaos. Aussi l’art de bien gouverner est en réalité l’art de maîtriser le chaos, d’utiliser ce qu’il a de mieux à offrir comme un principe de physique élémentaire. Les attributs du chaos sont d’ailleurs dans ce domaine prévisible puisque c’est la caractéristique principale de l’univers tout entier. Il chasse l’ordre ancien et instaure une nouvelle organisation dans un équilibre renouvelé, dès lors que les extrémités sont rognées et adoucies de leur rugosité. Les extrémistes croient bouleverser les structures afin de pouvoir s’emparer des commandes. En réalité, ils créent de nouveaux extrémistes en leur sein, de nouveaux radicaux qui bouleversent leur cohésion. C’est cette faiblesse qu’il faut exploiter pour les combattre. Ils ne sont que des prétendants au pouvoir et comme tous rebelles ils ne sont pas désintéressés mais cherchent à étendre une forme de domination oppressive sur les masses. Ils sont tous des hypocrites, conscients ou inconscients.

L’histoire humaine est faite de peuples et de sociétés, de civilisations stériles dans des postures répétitives. La mémoire ancestrale, l’instinct animal ou la prédestination fatale s’exercent comme des leviers sur nos pensées et sur nos actes. Les armées sont des machines humaines, nées des rêves de grandeur qui en ont fait des instruments de souveraineté et de gouvernement de base. L’armée favorise la technologie parce que la suprématie des machines parait évidente. Mais toutes les machines sont imparfaites et condamnées à être dépassées. Pourtant les armées leur rendent un culte à la fois plein d’effroi et de fascination. En cela elles s’apparentent à des apprentis sorciers. Elles libèrent la technologie et plus jamais le génie ne peut réintégrer la bouteille de laquelle il est sorti. Celui qui n’a pas entendu les lamentations des blessés et les cris d’agonie sur les champs de bataille, ne connaît rien à la guerre. La mentalité guerrière est atavique en l’Homme. Infliger des blessures par poing, bâton, caillou, gourdin, épée de bronze, de fer, d’acier, fléau ou canon, flèches ou projectiles, suffocantes retombées de poussières atomiques, invasions biologiques, le bref jaillissement de flamme qui tue et l’action insidieuse du poison lent a toujours été perfectionné par le développement technologique. La paix apparaît dans un tel monde comme une tranquillité forcée. Le monde des Hommes aurait pour ainsi dire, de tout temps, résisté à la tranquillité. En effet, dans de mauvaises mains, un pouvoir monolithique et centralisé représente un outil dangereux et peu durable. Le pouvoir va de pair avec certains rôles dans la société, de même qu’il va toujours avec la connaissance. Un état de guerre incessant finit par engendrer ses propres conditions sociales qui ont toujours été semblables à toutes les époques. La société se met en état d’alerte permanent afin de parer les attaques. Les autocrates exercent au grand jour leur pouvoir absolu. Tout prend un air suspect. Le féodalisme s’implante fermement. La succession héréditaire suit les lignes du pouvoir. Le sang des dirigeants domine pour contrôler l’héritage. Tous les dirigeants ordinaires ont des sentiments et des motivations qui dépassent ceux qui leur sont généralement attribués par des historiens trop faciles. Ces sentiments et ces motivations constituent un legs dénaturé par l’histoire. L’histoire a tendance à magnifier certaines caractéristiques au détriment des autres. L’historien essaie de comprendre, de cerner avec des mots. Il recherche la ‘’vérité’’. Mais la ‘’vérité’’ porte le poids de l’ambigüité des mots utilisés pour l’exprimer. L’histoire, les historiens ne comprennent pas. Plus ils essaient, plus l’objet s’éloigne de leur entendement jusqu’à disparaître finalement dans le mythe éternel…en vrai Dieu vivant. La vérité est très recherchée mais elle peut être dangereuse pour celui qui l’approche sans précaution. Les mythes et les mensonges sécurisants sont bien plus faciles à trouver, à vivre, à gérer et à accepter. Celui qui découvre une vérité, même provisoire, elle exigera de lui de profondes et déchirantes révisions de ce qui est établi. Aussi cache-t-on les vérités à l’intérieur des mots. Leur ambigüité naturelle le protège pour ainsi dire. Les mots sont toujours plus faciles à absorber que les oracles prophétiques non verbaux. Inévitablement, il y a surabondance de mots. Sous leur surface gisent les impulsions non-verbales d’évènements terribles. Les mots ont un pouvoir mystérieux depuis longtemps reconnu. Ils recèlent un secret qui peut être utilisé pour gouverner ceux qui n’ont pas de mémoire. Les vérités sont la substance des mythes et des mensonges sur lesquels se sont toujours appuyés les faux-prophètes et les tyrans pour manoeuvrer les masses à leurs propres fins égoïstes. Le seul véritable passé et l’unique récit de l’histoire de l’humanité, pérennes, gisent en nous sous forme non-verbale. Dans toutes les forces socialisantes majeures se trouve un mouvement sous-jacent visant à gagner et à conserver le pouvoir par l’usage des mots. La masse gouvernée doit être conditionnée afin d’accepter les mots-pouvoir comme des choses réelles, afin de confondre le système symbolisé avec l’univers tangible. Dans le maintien d’une telle structure de pouvoir, certains symboles sont tenus à l’écart de la commune compréhension, tels ceux qui ont trait à la manipulation économique ou encore ceux qui définissent l’interprétation locale de la santé mentale. De tels secrets quant aux symboles conduisent au développement de sous-langages fragmentaires, chacun signalant que ses utilisateurs accumulent une certaine forme de puissance. Avertie de ce processus de création de pouvoir, la force de sécurité sociale devrait être constamment attentive à la naissance de tels sous-langages. Quand on croit à certains mots, on croit à leurs arguments cachés. Quand on croit que quelque chose est exact ou faux, juste ou injuste, on croit aux hypothèses contenues dans les mots qui expriment les arguments et les justifications avancées. De telles hypothèses sont souvent pleines de trous, mais elles ont la qualité précieuse de convaincre. On appelle cela démagogie. L’univers ne peut être appréhendé en autant de parcelles, immobiles, étiquetées. Les choses ne peuvent être éternellement ordonnées et formulées. Il faut trouver le rythme du changement et, dans les intervalles, discerner le changement lui-même. Le passé se lit dans l’avenir, le présent dans le passé, le maintenant tout à la fois dans le passé et dans l’avenir, l’accumulation des siècles entre deux battements de coeur. Comme pour les objets que l’on observe d’une certaine distance pour n’en saisir que le principe, le passé et le présent se distinguent clairement par-delà les distances. Et le passé nous révèle un lointain ancêtre ultime. Sans lui, le lointain avenir ne peut être. Ces claires distances apportent des principes nouveaux, de nouvelles dimensions de partage. Quelle que soit l’existence que l’on choisit, nous devons la conformer à une sphère autonome d’expériences amassées, à une chaîne d’existences si complexe qu’une vie entière ne suffirait pas à dénombrer les générations qui la composent. Cette conscience de masse une fois réveillée, est assez puissante pour dominer notre Moi. Elle peut s’imposer à un individu, une nation, une société ou une civilisation tout entière pour permettre d’éviter de refaire les mêmes erreurs. Mais la maladie de l’indifférence détruit tant de choses. Même les civilisations peuvent en mourir. Comme s’il s’agissait du prix exigé pour parvenir à de nouveaux degrés de complexité ou un nouvel état de conscience.

Périodiquement, l’humanité connaît une accélération de ses activités, retrouvant ainsi la compétition entre la vitalité renouvelable de vivant et l’attirante viciation de la décadence. Dans cette course périodique, toute pause est un luxe. Alors seulement on peut dire que tout est permis, que tout est possible. Pour aussi étrange que cela puisse paraître les grands combats ne sont pas toujours visibles à leurs participants. Bien des choses dépendent de ce que les gens rêvent dans le secret de leur coeur.

Il est sage que, dans les moments importants, les décisions soient supervisées par des esprits généralistes. Les experts et les spécialistes conduisent rapidement au chaos. Ils sont une source intarissable de chicaneries inutiles et de controverses. Les décisions doivent être empreintes de bon sens solide. L’esprit ne doit pas se couper du courant principal des évènements de l’univers. Il doit demeurer capable de déclarer : «Pour le moment il n’y a pas de vrai mystère. Ceci est ce que nous voulons maintenant. Cela peut apparaître faux plus tard, mais nous ferons les corrections nécessaires quand le moment sera venu ». L’esprit de décision doit comprendre que tout ce que nous pouvons identifier comme étant notre univers fait simplement partie de phénomènes plus vastes. L’expert regarde en arrière, dans les catégories étroites de sa propre spécialité. Pour prendre de bonnes décisions, il faut au contraire regarder au loin, chercher des principes vivants tout en sachant pertinemment que de tels principes changent, qu’ils se développent. Il faut alors regarder les caractéristiques du changement lui-même. Il ne peut exister de classification, de typologie ou de catalogue permanents pour de tels changements, aucun traité ou manuel. C’est sans préconception qu’il faut les regarder, tout en se demandant ce que fait cette chose.

L’homme est animé d’orgueil cynique dans sa démarche, d’autant s’il est gouvernant. Attirer l’attention est une préoccupation et nous devons accepter cela comme une
simple nécessité. Demain n’est pas encore là et pourrait ne pas venir. Le moment présent est le seul instant et le seul lieu par nous observable dans notre univers. La croissance et la mort d’un gouvernement se lisent dans la croissance et la mort de ses citoyens.

Il existe une profonde différence émotionnelle entre l’histoire telle qu’elle est consignée et enregistrée, celle que l’on lit selon son bon plaisir et l’histoire que l’on vit. Cette histoire nouvelle et vivante qui se cristallise et se rassemble autour de nous, plonge vers un avenir irrésistible et imprévisible. Nous sommes emportés par les désirs et les actes de tous ceux dont les destinées accompagnent la nôtre. Et il est étrange que nous ne puissions inscrire nos désirs propres dans ce courant.

La créativité régie par des lois, cela n’existe pas de façon naturelle quand on a affaire aux civilisations humaines. Vouloir attribuer des règles à la création sociale, cela revient à essayer de séparer l’esprit du corps. L’évolution par succession de transformations génère des imprévus et les sociétés comme les civilisations n’échappent pas à ce postulat. Les règles de la création changent à chaque imprévu pour l’amélioration de l’espèce. La guerre génère des prédateurs qui, dit-on, améliorent les civilisations par exclusion des faibles. Les prédateurs tuent, mais sont à leur tour tués par les chasseurs. Manque-t-il aux sociétés humaines un vrai prédateur qui transformerait l’humanité pour qu’il soit capable de prendre de véritables décisions à long terme. On se le fabrique de toute pièce comme ennemi à nos portes. La clef est en fait l’aptitude à changer et la capacité de provoquer et d’accepter ce changement. Le long terme ce n’est pas des milliers d’années. A l’échelle de l’évolution ce n’est qu’un bref soupir face à l’infini. Par rapport à l’infini, tout long terme délimité équivaut à un court terme. Les décisions à court terme risquent de mener à l’échec à long terme, d’autant que pour un observateur fini le temps coule toujours. Des systèmes clos cela n’existe pas. Dans le temps, durant notre existence nous ne faisons qu’étirer la matrice finie de l’histoire des Hommes. Mais à la fin, tout et tous doivent mourir et disparaître. Cela n’a pas de réelle importance dans l’absolu, si l’on ressent la continuité immuable de l’humanité qui seule compte vraiment.

Les Hommes ont créé le monothéisme car c’est plus simple de croire en un seul dieu qui veille sur ses créatures, qui ne leur demande pas de lutter pour la connaissance, qui les accepte comme ils sont, avec leurs pêchés qu’un pèlerinage suffit à effacer. Ils se forgent le Dieu qu’ils désirent ou plus simplement peut-être, celui qu’ils méritent. Si on applique cette conception de Dieu, modèle de la réalité des intégristes de l’extrême, il n’est pas difficile d’imaginer l’avenir qu’ils préparent aux Hommes. Et cela suffit pour avoir envie de les combattre et de les rejeter. Se réclamer d’une croyance et commettre des actes inhumains est absurde et en contradiction avec le principe même d’humanité. Les islamistes sont des prédateurs qui ont été engendrés par les contradictions d’un système social qui se cherche. Ils se réclament de l’Islam et croient devoir le défendre. De quel droit et qui leur en a donné mandat ? Certainement pas le Dieu de tout le monde. Une religion n’a aucunement besoin d’être défendue surtout par le fanatisme extrême. Dieu est lui-même. L’essence de la genèse est le germe de toute conscience. Dieu est conscience, conscience universelle. Très ancien, il est le seul à connaître son hérédité. Dieu est innocence et est dépourvu de naïveté ou de brutalité. Il n’est pas un dieu de répression et de violence comme nous le font croire ces fous de l’islam radical, un islam qu’ils ont créés de toute pièce à partir de leurs fantasmes de domination des sociétés humaines. S’il est vraiment Dieu, il ne règne pas par la terreur contrairement aux extrémistes qui n’ont pour terrain de manoeuvre que l’exclusion, la violence et la peur. Dieu sait très bien ce qu’il y a dans les coeurs. L’âme lui suffit comme indicateur. Il n’a pas besoin de témoins à charge ni de gestes futiles et préréglés. La religion politique mène inévitablement au despotisme rhétorique. Il conduit à des prophéties auto-proclamées et auto-exaucées et à la justification de toutes sortes d’obscénités (comme la prostitution au nom du jihad). Il dissimule le mal derrière des cloisons imperméables à tous les arguments raisonnables contre le mal. Il se nourrit de significations délibérément perverties afin de discréditer toute opposition. Il en résulte une hypocrisie sans cesse trahie par le décalage entre les actes et leurs explications, qui ne concordent jamais. Cette hypocrisie amène la chasse aux sorcières, l’inquisition et la nécessité de trouver des boucs-émissaires pour tous les maux. La Divinité n’a besoin d’assumer aucune responsabilité en dehors de la genèse. Elle accepte tout par mutisme consentant et par conséquent n’accepte rien. Elle n’a pas besoin d’un monde spirituel séculier. Son esprit habite en elle, forcé de répondre à la moindre de ses sollicitations. Elle est sa vérité.

Les conceptions extrémistes des religions dévorent leurs adeptes de l’intérieur qu’ils soient empires, civilisations ou individus. Le sectarisme et l’extrémisme ne servent qu’à créer des extrémistes et des fanatiques. C’est une lapalissade. Croire à la genèse et à une création autre qu’hasardeuse suppose une prédisposition à un comportement plus protecteur de la vie et non un débordement anarchique destructeur. C’est l’âme de l’humanité et la sagesse est la gardienne de sa pérennité non la folie.

Les religions offrent des occasions de partage cérémoniel qui alimentent la mémoire. Le partage en ces occasions est toujours une préparation à quelque chose de plus grand et qui élève et non quelque chose qui avilit et abaisse au rang de l’animalité.

Tels sont les instruments du pouvoir religieux de base. Tout pouvoir de base est toujours dangereux parce qu’il attire des gens insensés, des gens qui recherchent le pouvoir uniquement pour lui-même. Dans l’ombre de chaque religion se cache une inquisition. L’inquisition est une obscénité qui immole les opposants sur les bûchers de la pseudo-morale. La mort annoncée par de faux prophètes doit-elle être suivie du suicide moral de tous les hommes ? Nous devons combattre la fraude et les tricheries des religions conventionnelles, institutionnalisées. Toutes les religions qui se mêlent de politique glissent vers la lâcheté, vers la médiocrité, l’inertie et l’autosatisfaction. Tous les prêtres, muftis, rabbins et autres prêcheurs ne sont que les aumôniers de l’autosatisfaction. Une religion peut-elle donc être réelle quand elle coute des vies sacrifiées inutilement, quand elle comporte des risques ? Est-elle réelle dès lors que ses représentants, ceux qui parlent pour elle, s’engraissent sur elle en envoyant ses fidèles à la mort ? Est-elle réelle lorsque des atrocités sont commises en son nom ? Toutes les religions ont généré leurs extrémismes et leurs dérives depuis leur révélation originelle et n’ont rien fait pour les arrêter. Les prédicateurs de l’apocalypse imposent une perception personnelle du monde pour susciter un certain comportement social et influencer des évènements que l’on voit directement, évènements destinés à se produire dans un système connexe que le prophète révèle et interprète à sa manière comme les devins de l’antiquité qui disaient les augures. Une telle perception se comporte comme un piège particulier pour le prophète lui-même et ses disciples. Ils peuvent être les victimes de ce qu’il prétend savoir. Le danger tient au fait que ceux qui prétendent prédire des évènements réels peuvent négliger l’effet polarisant d’une trop grande confiance dans leur vérité propre. Ils tendent à oublier que dans un univers polarisé, rien ne saurait exister sans son contraire. L’univers est dichotomique. Les contraires confortent leur existence mutuelle. L’église et l’Etat, la raison scientifique et la foi, l’individu et la communauté, et même le progrès et la tradition. Tout peut être réconcilié car il n’existe pas d’oppositions absolues, si ce n’est dans les croyances des Hommes. Sinon, nous pouvons écarter le voile du temps et découvrir notre avenir et celui du monde dans le passé ou dans notre imagination. Ce faisant nous reconquerrons notre conscience, au-dedans de notre être. Nous savons alors que l’univers forme un tout cohérent et que nous sommes indivisibles.

Chaque année, la place est à nouveau remplie de pèlerins vêtus aux couleurs du Hajj (ou Hadj). Leur flot ondulant évoque chaque fois un grand serpent aux anneaux disjoints. Pour certains Etats, les pèlerins représentent une manne, une source de revenus importante, une ressource économique. Le Hajj lance des cohortes de vagabonds religieux sur les chemins du souvenir. Au long des siècles, dans l’architecture des gènes, était apparu le schéma de ce spasme que l’on appelle religion. Poussés par l’instinct religieux, ils aboutissent dans divers lieux de la renaissance et de la mort.
Que cherchent vraiment les pèlerins ? Ils prétendent que ces lieux de référence sont saints et qu’ils sont mitoyens d’un Eden pour leurs âmes. Pour eux, ils sont les centres de l’inconnu, les points où tous les mystères reçoivent une explication, un endroit entre cet univers et celui à venir. Et ce qu’il y a de stupéfiant, c’est qu’ils en repartent apparemment satisfaits. Mais une chose est indiscutable : si paradis il y a, ce n’est certainement pas un lieu ouvert aux criminels et aux fous fanatiques qui croient que tuer des innocents en série en est la clé pour leur ouvrir ses portes. Ce n’est certainement pas non plus ce lieu de luxure qu’on leur présente et qu’ils espèrent par leurs actes de folie. Pour usurpation de l’identité de la divinité, ils encourent tous autant qu’ils sont son courroux et par conséquent la damnation éternelle en plus de la vengeance des Hommes. De ce point de vue, on constate que ce que la religion et l’intérêt personnel ne peuvent dissimuler, l’art de mystifier le peut. Les tenants des sectes sont éduqués et formés dans toutes les astuces mensongères de la manipulation, les doubles sens et les mots du pouvoir. Le langage devient une arme tout comme peut l’être aussi la religion quand elle se mêle de politique. Elle devient ensuite terreur, cette arme, quand la religion devient le gouvernement, celui d’un monstre qu’on appelle théocratie. Un gouvernement ne peut être à la fois religieux et séculier, libertaire et coercitif. C’est un paradoxe mortel. Toute expérience religieuse a besoin de spontanéité que la loi supprime inévitablement. Mais on ne peut gouverner sans lois. Inévitablement, les lois en viennent à remplacer la morale, la conscience et même la religion au nom de laquelle on gouverne. Le rituel sacré ne peut naître que des louanges et des prétentions à la sainteté qui effacent toute moralité signifiante, matérialiste. Le paradoxe s’installe définitivement lorsque la cérémonie et les procédures tiennent lieu de foi et le symbolisme de moralité. La moralisation par la religion n’apporte que des illusions. Les illusions d’histoire populaire telles que : ‘’les Hommes mauvais jamais ne réussissent ; seuls les braves méritent le bien ; l’honnêteté est la meilleure des conduites ; les actes vont plus loin que les mots ; la vertu triomphe toujours ; un bienfait est sa propre récompense ; tout être humain mauvais peut être ramené vers le bien.’’. Pourtant que d’exactions, de crimes de toutes sortes sont commis au nom de ces propos. Le terrorisme lui-même y plonge ses racines.

Il est un attentat que personne ne veut dénoncer et qui pourtant est un crime contre l’humanité, attentat commis lui aussi par l’organisation de l’Etat islamique. Il s’agit de la destruction de reliques millénaires qui appartiennent à toute l’humanité. C’est le vandalisme perpétré à la masse et au burin des monuments qui ont été légués pour mémoire par de grandes civilisations passées par ces fous qui se réclament de Dieu, mais qui ne sont rien d’autre que des barbares rétrogrades et païens. C’est un attentat criminel des plus graves contre la mémoire des peuples et contre les racines mêmes de la civilisation. C’est un viol du savoir et de l’intelligence des peuples, un rejet stupide et puéril de l’histoire. L’humanité a connu un autodafé géant en Allemagne peu avant la seconde guerre mondiale en 1933 après l’accession au pouvoir du parti nazi. D’autres se sont produits consécutifs chaque fois avec la montée du totalitarisme et de l’obscurantisme fasciste. Et voilà que l’organisation terroriste de l’Etat islamique brule deux milles ouvrages de la bibliothèque de Mossoul, privant l’humanité d’une partie de sa mémoire et de son histoire, des oeuvres datant de 5000 ans avant Jésus-Christ. Par ailleurs, le tombeau du prophète JONAS à Mossoul a été détruit lui aussi, à l’explosif, pour faire table rase de toute mémoire et éviter toute restauration possible. Le comble de l’ignorance sauvage c’est qu’ils semblent ignorer que Jonas est considéré comme un prophète dans toutes les ‘’religions du livre’’. Il est présent dans la tradition juive. Il est aussi dans la tradition chrétienne. C'est également un prophète pour les musulmans, et son histoire est racontée dans le Coran. Ce crime a été commis au nom d'un fanatisme qui semble refuser toute représentation iconographique et tout art religieux. On se souviendra que dans des circonstances similaires, les talibans avaient détruit en 2001 les bouddhas de Bamiyan datant du Vème siècle, ainsi que les 55 000 livres rares de la plus vieille fondation afghane, tout comme les djihadistes ont détruit les mausolées de Tombouctou au Mali et investi sa bibliothèque. Pour leur part, les terroristes de l’organisation de l’Etat islamique ont aussi détruit le tombeau de Jonas par pur fanatisme iconoclaste et purisme totalitaire. Une mentalité terrifiante, extrémiste, fanatique et barbare qui les a conduit à chasser les chrétiens, à mutiler les femmes et à détruire des sites religieux vieux de 2500 ans, ainsi que des merveilles artistiques millénaires inégalées et irremplaçables ! Le purisme mystique pervers de cette frange de l'islam conduit systématiquement à une haine paranoïaque de l'art, un purisme religieux qui ne débouche que sur la forme la plus primitive de la violence. L'Islam ce ne peut être ça ! Lorsque l’on considère qu’il a pourtant permis des choses sublimes en matière artistique. Et de toute façon il n'y a pas de religion sans rapports avec le beau et la perfection. Le plus étonnant c’est que personne ne semble concerné par ces faits et c’est dans l’indifférence la plus totale que cette forfaiture est menée depuis assez longtemps. Rejet de nos racines et de notre identité humaine, Les monuments ne semblent pas faire le poids face à des intérêts mesquins et inférieurs, en général énergétiques, économiques ou financiers. Le plus surprenant, c'est que personne n’en parle, le monde semble décérébré et insensible sur cette question, sans doute par considération mystique pour les pays arabes hypocrites, Ou qu’on considère simplement qu'il n'y a plus rien à faire dans cette partie du monde pour les autres pays. C’est un laxisme complice de toutes les parties du monde. Il faut en parler, faire un tapage médiatique
géant, crier au scandale. Même si on n'est pas Irakien ou Syrien on ne devrait pas pouvoir rester indifférent à ces outrages qui nous rendent orphelins d’une partie de nos racines et efface notre mémoire. L’urgence est que les pouvoirs publics mondiaux doivent exprimer de manière ferme et constante notre indignation extrême face à ce drame. Le message est simple : ces actes de vandalisme ne sont pas acceptables ! ce sont des crimes.

Chaque question qu’elle soit religieuse, gouvernementale, sociale ou financière, se résume dans l’exercice du pouvoir et de son détenteur. Les alliances, les combinats, les cartels, se lancent à la poursuite de mirages s’ils ne visent pas directement le pouvoir. Tout ce qui est en dehors de la question n’est qu’absurdité et la plupart des pensants commencent à le comprendre. Cela se traduit en énergie comme seule véritable réalité. C’est l’apprentissage de cette énergie que nous appelons la puissance. Où que nous portions notre regard, nous sommes confrontés à cette puissance. Qui gouverne assume une responsabilité irrévocable envers ses sujets. Il convient de s’opposer au détenteur du pouvoir dans son effort pour en atteindre le monopole par le jeu de la législation. Il y a des limites au pouvoir et ceux qui mettent leurs espoirs dans une constitution les découvrent toujours. Les constitutions sont l’aboutissement ultime de toutes les tyrannies. Elles organisent le pouvoir sur une vaste échelle afin qu’il ne puisse être renversé. La constitution n’a pas de conscience. Elle est la mobilisation du pouvoir social. Elle peut briser le plus grand comme le plus petit, balayer toute dignité et toute individualité. Son point d’équilibre est variable et elle ne connaît pas de limitations. Les divers Etats sont autant de terrains génétiques, autant de sources d’enseignement et d’enseignants, de sources de possibles. Les limitations du gouvernement permettraient de contrôler ces sources, d’apprendre et de libérer l’Homme de toutes les contraintes imposées par le gouvernement et la dépendance. Les peuples s’en tiennent à un gouvernement central parce que l’espace à maîtriser est vaste. Sans un symbole d’unité, ils seraient gagnés par une impression de solitude. Alors, pour ceux qui sont seul, le gouvernement constitue un lieu sûr, défini. Ils peuvent se tourner vers lui et dire ‘’le voici, il est bien là ; à lui seul, il est nous’’. Peut-être est-ce cela que l’on appelle la souveraineté populaire. On apprend à gouverner adulte, comme on apprend à marcher enfant. Cet apprentissage est un conditionnement pour une avidité extrême de puissance et de conquête du monde. L’art de gouverner suppose une connaissance subtile des jeux de la politique ainsi qu’une profonde compréhension des rites et de la guerre. Il existe des lois naturelles qui disent que l’histoire de l’humanité est hantée par le mythe, un fantôme irréel, sans substance, la mégalomanie et la démesure. Cela part du principe selon lequel le peuple ne veut pas d’un comptable ou d’un gérant pour gouvernant. Il aurait besoin d’un maître, de quelqu’un qui le protègerait du changement et de lui-même. Le principe-guide c’est la justice, l’opposition de deux forces dans l’arène de l’Etat. Chacune disposerait du bon droit dans sa propre sphère. Les solutions qu’imposerait un gouvernement obéiraient à l’ordre. Les collisions qu’il ne pourrait empêcher, il lui faudrait les résoudre en décidant, en gardant ses alliés et ses amis et en détruisant ses ennemis. C’est semble-t-il la stabilité qui serait le résultat recherché. On considère que le peuple veut l’ordre de quelque manière que ce soit. Il demeure dans la prison de ses appétits et ses ambitions et laisse la guerre aux armées. Pour lui la guerre c’est le désordre.
Tous les dirigeants se considèrent comme les inventeurs d’un système de gouvernement original. Mais leur invention, si elle existe, rejoint les schémas anciens, comme si elle était quelque hideuse machinerie dotée d’une mémoire élastique. Il suffit d’un bref relâchement de la vigilance pour que les formes du passé reviennent. La loi est un contrôle. Elle filtre le chaos et laisse passer la sérénité. La loi est l’idéal le plus élevé et le premier fondement de l’ordre social. Elle est faite d’interprétations rationalisées, de casuistique légale, de précédents commodes. D’un autre côté, le gouvernement constitue un organe culturel particulièrement enclin aux doutes, questions et contradictions. Il existe une limite à la force que les plus puissants eux-mêmes ne sauraient atteindre sans se détruire. L’art véritable de tout gouvernement est d’évaluer cette limite. Le mauvais usage du pouvoir constitue une erreur fatale. La loi ne peut être un outil de vengeance, pas plus qu’un otage ou une barrière contre les martyrs qu’elle a pu créer. On ne peut menacer les individus et se soustraire aux conséquences.

Jamais encore les liens qui existaient entre l’environnement et le comportement humain ne sont apparus aussi évidents. L’Homme est devenu partie intégrante d’un système dynamique à l’équilibre fragile. Cette perspective devrait provoquer en lui un changement de conscience et un déferlement d’observations. L’univers est le théâtre d’une conversation permanente entre les populations et la nature. Chaque espèce lui parle en tant que maître. Dans son essence l’Homme reste spécialisé, survivant de la sélection naturelle, expert à gouverner dans certaines conditions de tensions. Les décisions devraient être pesées selon le pouvoir qu’elles ont de maintenir une société ordonnée, telles que la notion d’égalité ou de justice et non sur des abstractions que l’on pourrait considérer futiles. Le maintien de l’ordre dans la société n’est pas une justification pour un jugement qui n’aurait rien à voir avec une quelconque histoire de justice.

Tenter de parvenir à ce faux équilibre, c’est menacer une société. La justice dans l’égalité est difficile à réaliser car elle n’existe réellement nulle part. Les décisions sont pesées selon le pouvoir qu’elles ont de maintenir une société ordonnée. Bien des civilisations et des empires du passé ont sombré après s’être heurtés aux écueils de la justice et de l’égalité. La difficulté de les concilier détruit les hiérarchies artificielles qui servent de fondements à l’ordre social régalien selon lequel un individu n’a de sens que par les relations qu’il entretient avec l’ensemble de la société. Si cette société n’est pas logiquement organisée, si elle est stratifiée, nul ne pourra y trouver sa place, de la plus élevée à la plus humble. Les gouvernants se considèrent comme la figure de proue de leur peuple et ne conçoivent leur devoir que comme le maintien de l’ordre. Au centre du pouvoir, il y a les gouvernements, instruments d’équilibre, les finances et la force.

C’est une situation devenue commune dans notre univers que celle d’un peuple important maintenu sous la coupe d’une force réduite mais puissante. Nous connaissons aussi les conditions majeures qui conduisent le peuple à se retourner contre ceux qui se considèrent ses maîtres:

  • Lorsque ce peuple se trouve un chef. C’est la menace la plus fréquente contre le pouvoir et celui-ci s’attèle à contrôler les chefs potentiels pour éviter qu’ils ne montent.
  • Lorsque le peuple prend conscience de l’existence de ses chaînes. On fait en sorte que le peuple demeure aveugle et muet.
  • Lorsque le peuple discerne un espoir de pouvoir échapper à ses entraves. On détourne son attention pour qu’il ne puisse même l’imaginer. Le peuple doit apprendre que l’opposition est toujours punie et que le soutien au pouvoir est toujours récompensé.

Pour être bien gouvernée, la société doit avoir la possibilité de choisir des Hommes dont la vie est le reflet de ce que devrait être un gouvernement. Mais d’abord, il faut qu’ils prouvent que leurs actes seront ceux d’un chef.

Les civilisations sont anciennes et notre passé l’est tout autant. Si on cède à cette tendance, nous construirons une société fermée, totalement dépendantes des coutumes de jadis. Le bon gouvernement ne dépend jamais des lois, mais des qualités personnelles de ceux qui gouvernent. La machine gouvernementale est toujours subordonnée à la volonté de ceux qui l’administrent. Il s’ensuit donc que l’élément le plus important de l’art du gouvernement est la méthode selon laquelle les chefs sont choisis. Si un gouvernant concentre sa conscience seulement sur la justesse de son attitude, il appelle les forces d’opposition à le balayer. C’est une erreur très commune en politique.

Les loyautés réelles ne se rencontrent que rarement dans les rapports d’intérêt. La faiblesse des sociétés réside peut-être dans le fait que nous supposons faussement qu’il est possible d’ordonner aux Hommes de penser et de coopérer. Cela au cours de l’histoire a entraîné la faillite des dogmes et doctrines comme celle des Etats. Les Hommes doivent désirer accomplir des choses en accord avec leurs pulsions profondes. Ce sont les gens et non les organisations sociales ou les hiérarchies qui font la réussite de grandes civilisations. Chaque civilisation dépend de la qualité des individus qu’elle produit. Si nous sur-organisons les humains, si nous les sur-légalisons, si nous supprimons leur élan vers la grandeur, alors ils ne peuvent oeuvrer et les civilisations s’effondrent.

Dans tous les cas, l’univers est là, tout simplement ! Il tourne autour de nous et c’est la manière dont on puisse le voir et rester maître de ses sens qui compte. L’univers ne menace ni ne promet. Il contient des choses qui échappent à notre influence : La chute d’un météore, l’éruption d’un volcan, le cours du temps, la vieillesse et la mort. Telles sont les réalités de l’univers et il faut les affronter sans se soucier de ce que l’on ressent à leur propos. On ne peut les écarter par des mots. Elles n’auront pas de mots quand elles viendront à nous et alors, alors nous comprendrons ce que l’on entend par la fatalité. La vie et la mort peuvent être naturelles mais pas le terrorisme et non plus les erreurs de gouvernement ou encore l’incapacité à prendre de vraies mesures de gouvernement. Ceux qui sont morts fauchés par des bandits de grands chemins n’en ont rien à faire qu’on les considère comme des martyrs tout comme les enfants qu’ils ont laissés derrière eux. Martyrs oui mais le peuple a la mémoire courte et dans quelques jours, quelques semaines peut-être il ne se souviendra même plus de leurs noms. Mais le phénomène qui a causé leur mort, quand l’arrêtera-t-on ?

La vie est un masque par lequel l’univers s’exprime. L’humanité ainsi que toutes les formes de vie qui l’entourent, représentent une communauté naturelle et le destin de toute la vie se joue dans celui de l’individu. En parvenant à cette ultime auto-analyse, nous cessons de jouer aux dieux et retournons à l’enseignement. L’avenir est incertain et peut-être doit-il le rester car il est la toile sur laquelle nous peignons nos désirs. Vivre la condition humaine c’est aussi affronter une belle toile vide. Refuser de se mouvoir c’est rester pris dans la trame intemporelle de l’éternel maintenant où tous les évènements coexistent. Alors le temps et l’espace seront perçus comme une convention façonnée par l’esprit collectif de tous les être pensants pour plier l’univers et le réduire.

Vendredi 10 avril 2015
Monji Ben Raies
Universitaire
Enseignant et chercheur en droit public
Faculté de droit et des sciences politiques de Tunis

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