News - 28.11.2014

La stratégie frontale de Marzouki est-elle payante?

«Indéniablement, Moncef Marzouki a été plus rapide et plus frontal dans sa confrontation pour le deuxième tour avec Béji Caïd Essebsi », explique à Leaders un spécialiste en communication politique. "Galvanisé par le million de voix inespérément gagnées, et optant pour une stratégie de la pression sur son adversaire, il a usé de tous les subterfuges, ajoute-t-il. D’abord, il a enjoint le chef de Nidaa Tounès de désigner dans un délai n’excédant pas une semaine à partir de la proclamation des résultats définitifs des législatives, c'est-à-dire ce vendredi 28 novembre, le chef du gouvernement de son choix ».

 «Deuxième tour de vis, c’est le président sortant de l’Assemblée nationale constitutionnel, et candidat recalé à Carthage, qui le lui offre. Mustapha Ben Jaafar a eu cette fois-ci la main rapide en convoquant les élus de la nouvelle Chambre des Représentants du Peuple à se réunir dès ce mardi 2 décembre. Ce faisant, tout en respectant les formes constitutionnelle, il resserre l’étau sur Caïd Essebsi pour trancher avec Ennahdha et les 3 autres partis arrivés premiers aux législatives, les accords nécessaires pour ce qui est de la présidence de la Chambre et la composition de son bureau ».
 
Troisième tour de vis, le dépôt d’un recours en contestation du scrutin devant le tribunal administratif, pour de nombreuses raisons, y compris, l’impossibilité de rapprocher la date du deuxième tour au 14 décembre, ou encore 21 du même mois. L’objectif est de profiter de ce délai pour mobiliser davantage de troupes.
 
« Mais, il n’y a pas que le jeu des procédures qui est activé. Le discours de Marzouki et de ses partisans se concentre sur une thématique ciselée : son camp est celui des forces démocratiques, défenseurs des acquis de la révolution et des droits de l’homme, ouvert à tous, il attire les jeunes et se préoccupe des régions négligées, bref, l’espoir et l’avenir. Quant à son adversaire, c’est celui du passé, de l’ancien régime, de la bourgeoisie. »
 
« A ce changement de discours plus radicalisé s’ajoute un changement de casting. Les faucons du CPR sont relégués en deuxième plan, pour laisser la place à des jeunes, jusque-là inconnus. Et ce sont ces nouvelles têtes qui sont le plus souvent envoyées sur les plateaux, même si pour les grands combats, Imad Daïmi, Tarek Kahlaoui et, en appoint, Mohamed Abbou, montent au créneau. L’équipe de la campagne se veut, aussi, différente de celle du CPR et a établi ses quartiers généraux dans plusieurs sites dans la capitale et sa proche banlieue, tous en dehors du siège du CPR, avenue Hédi Chaker ». 

Une stratégie controversée

Voilà pour l’analyse, mais qu’en est-il pour la conclusion. « Marzouki, estime notre spécialiste, a bien profité de sa position de président provisoire encore en fonction pour les aspects constitutionnels. Mais aussi, de challenger agressif et de l’attitude désarçonnée de certains dirigeants de Nidaa qui avaient cru aux chances de BCE de faire un passage en force dès le premier tour. Du coup, il a pratiqué ce qui est qualifié d’’attaque éclair et frontale en 360 degrés ». 
 
«Cette stratégie, estime-t-il, ne peut aboutir que si les délais entre les deux tours sont raccourcis, deux semaines au plus, les nouvelles têtes sont blindées et accrochent l’opinion et si le réservoir de voix disponibles est encore marqué par un taux élevé d’incertitude de ralliement. Or, dans le cas réel, le deuxième tour risque de n’intervenir qu’au bout de trois à quatre semaines ce qui laisse à l’autre camp le temps de rebondir et se redéployer, le nouveau casting a été cosmétique sans prise effective et la bataille portera beaucoup plus sur les accords de ralliement et le report des voix. Marzouki n’a pas opté pour la meilleure stratégie, à moins que... »
 
 
                                                                                                                                          Adel Ben Amar
 
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