News - 04.09.2014

Marzouki candidat: l'honnêteté doit le contraindre à démissionner

Le Président Provisoire (PP) compte se présenter aux prochaines élections présidentielles et commence à « prendre ses dispositions logistiques pour ne compter que sur ses propres moyens » Il a bien raison, car si on veut être le Président de tous les tunisiens, il ne faut s’appuyer sur aucun parti ni se faire aider par aucune formation ou organisation aussi désintéressée que soit sa contribution, et aussi bonnes que soient ses intentions.

Il va donc s’appuyer sur un état major de fidèles bénévoles (?) qui va l’aider à cogiter son programme politique, à préparer le terrain pour ses meetings dans toutes les régions, à organiser ses rencontres avec les citoyens, etc. Tout ceci occasionne des frais considérables (payés sur ses propres deniers, je suppose) et nécessite de fréquentes réunions préparatoires auxquelles il est appelé à prendre part ne serait-ce de manière sporadique.

Mais le candidat/Président nous l’a promis, il «n’utilisera guère les moyens de l’Etat qui lui sont actuellement affectés». Mais le mot «guère» veut dire «pas beaucoup» et «pas beaucoup» est un terme  d’appréciation non chiffrable, chacun l’évalue à sa manière selon le côté dans lequel il se trouve. Il n’empêche que l’idée d’utiliser les moyens de l’Etat n’est pas absente de cette déclaration. Le tout est de savoir comment est défini le ”pas beaucoup” et où s’arrêtre-t-il pour devenir ”beaucoup”.

Il est évident que le temps accordé par le candidat/PP aux réunions préparatoires et aux meetings est un temps pris sur sa fonction de Président. Comme les autres candidats, il va devoir se déplacer fréquemment dans toutes les régions, de Bizerte à Tataouine, pour porter la bonne parole, mobiliser ses troupes et prendre contact avec les électeurs. De ce fait, le temps  accordé à la campagne électorale va être important et devrait logiquement lui être défalqué du salaire. Après tout il a un salaire mirobolant qui représente près de 150 fois le SMIC, c’est-à-dire de quoi faire vivre pendant un mois tout un quartier dans une cité populaire. A ce prix, il doit toujours être au service de l’Etat, seules ses heures de sommeil lui restent personnelles. Va-t-il grignoter sur ces heures pour réunir son QG de campagne ? Si oui, comment seraient ses performances le lendemain dans sa fonction de Président Provisoire, pour laquelle il est payé sur nos impôts ?

Je suppose qu’au QG de campagne participent un certain nombre de ses collaborateurs. Comment faire la part de ce qui relève de leur fonction au palais, pour lequel ils perçoivent un salaire conséquent, et le temps passé au service de la campagne (réunions, discussions dans les bureaux et les couloirs, etc.). Et puis, les réunions de campagne vont probablement avoir lieu dans l’une des salles du palais (tout candidat lambda aura loué une salle)  y aura-t-il des frais de location de la salle et quelle somme faudra-t-il verser à son propriétaire, c-à-dire l’Etat ? enfin les déplacements du PP se feront en grandes pompes sous escorte quand il est Président, mais quand il est candidat, faut-il se défaire de l’escorte (ce qui est inconcevable en raison du risque encouru), ou faut-il plutôt faire payer l’escorte par le candidat, auquel cas comment calculer le prix et par qui?

utant de questions et bien d’autres qui montrent que les statuts de candidat et de Président sont intimement imbriqués et que le statut de ce dernier comporte des avantages inévitables par rapport à celui d’un candidat ordinaire. S’il veut faire preuve d’honnêteté et d’un souci d’équité, il faut qu’il démissionne de la présidence, comme l’a suggéré M. Omar S’habou dans le journal ’El Maghreb’. Mais est-il capable de le faire ? j’en doute fort quand me revient à l’esprit son image en train de jubiler dans l’hémicycle à la suite de son accession au trône. Quand on est avide de pouvoir, ces deux qualités font partie des détails et on ne s’arrête pas aux détails.

Mohamed Jemal