News - 24.02.2014

Présidence de la République, mon doux souci

Polémiques allant en s’enflant entre tel parti et tel autre, alliances et mésalliances ai gré des humeurs changeantes des uns et des autres,  campagnes électorales avant la lettre, tout laisse croire que l’accession à la présidence de la République est dans tous les esprits ou presque.  Hier tous les ténos étaient en campagne: Béji Caid Essebsi  à Menzel Témime, Ahmed Néjib Chébbi à Sfax,  Moncef Marzouiki à la Télévision sur Al- Waranya 1 et Hamed Karoui sur Nessma TV.

Même si la date de l’élection présidentielle comme celle des élections législatives n’a pas été fixée, les deux scrutins auront lieu dans le meilleur des cas fin 2014, elle semble être l’obsession de beaucoup de monde. Cette échéance détermine les prises de position et les réactions de  l’ensemble des acteurs de la scène politique. En dépit des attributions limitées qui lui ont été concédées dans la nouvelle Constitution, le poste de président de la république suscite les convoitises. C’est surtout en raison du fait qu’il est élu par le suffrage universel  qui lui donne une «prééminence» qu’il tire de cette légitimité des urnes. C’est peut-être aussi par le  «magistère» qu’il assure à son titulaire qui est aussi le «premier magistrat» du pays, «le symbole de son unité», et «le haut commandant» de ses forces armées. C’est aussi inconsciemment, en raison d’une longue tradition de régime présidentiel sinon «présidentialiste» qui en faisait le personnage central de l’Etat.

On se bouscule au portillon

Les polémiques qui vont en s’enflant entre Al-Joumhouri d’Ahmed Néjib Chabbi et Nidaa Tounés et son président Béji Caid Essebsi d’une part auquel il en veut pour sa volonté de domination de l’Opposition et d’autre part entre le premier et Attakotal  de Mustapha Ben Jaafar et le CPR, le parti de Moncef Marzouki accusés d’avoir placé le pays dans un «mur», ne peuvent se justifier que parce que Chabbi cherche à protéger ses chances de concourir sinon de vaincre au scrutin présidentiel. S’ils ne le disent pas franchement une dizaine au moins d’hommes politiques pensent à cette élection en se rasant le matin. Jusqu’ici pas une seule femme ne s’est vue des qualités pour entrer dans la compétition, même si le profil de Wided Bouchammaoui,  présidente de l’UTICA et membre du Quartet, une femme d’un caractère bien trempé ne manque pas d’atouts.

Tout en déclarant leur «flamme» pour la fonction suprême, peu de gens le proclament publiquement se cachant derrière soit le fait que sa date n’a pas été fixée soit que les instances de leur parti n’en ont pas débattu. Seul Abdelwahab Hani, président du Parti Majd qui écume les plateaux médiatiques sans que l’on sache ce que  pèse son parti a annoncé sa candidature. Sur une  radio privée, il a indiqué s’être déplacé à Carthage pour inviter le président de la République provisoire de démissionner s’il a l’intention de se présenter à cette élection. C’est une «proposition audacieuse» s’est contenté de répondre le locataire de Carthage.

Ben Jaafar, probable candidat

Les intentions de Moncef Marzouki restent inconnues, même si ses gestes montrent qu’il envisage de rempiler. Le Congrès pour la République, le parti qu’il a fondé, le pousse à se présenter. La «fuite» orchestrée, selon laquelle il s’apprête à démissionner pour se consacrer à sa candidature en dit long sur son état d’esprit. Les «festivités» multiples et variées qu’il organise en l’honneur de la ratification de la Constitution sont considérées comme le «coup d’envoi» avant terme de sa campagne. Il dit et répète qu’il ne remettra le poste qu’à un président élu. Comme pour affirmer qu’il ne démissionnera pas même s’il se présentait à la magistrature suprême. Rien ne l’y obligerait du reste.

Le président de l’Assemblée nationale constituante, Mustapha Ben Jaafar fort de la «notoriété» acquise cherche aussi à tirer profit de la Loi fondamentale dont ses affidés lui attribuent la «paternité». Il ne nie pas qu’il envisage de se présenter  et que dans ce cas il compte démissionner pour assurer «l’égalité des chances» pour tous. Son parti «Ettakatol» ne peut trouver mieux que lui pour porter  ses couleurs.

Le mouvement Ennahdha, le grand parti de la Troïka ne semble pas intéressé par le poste. Son président Rached Ghannouchi a soutenu à plusieurs reprises que son parti peut ne pas présenter de candidat. Ayant milité pour un régime parlementaire intégral, le parti islamiste n’a accepté des concessions sur les attributions du président de la république qu’à contrecœur. Ce poste peut, cependant, être une «carte de négociation» entre les mains  d’Ennahdha pour de futures alliances, car l’on sait qu’il est plus intéressé par la fonction de chef de gouvernement qui est le véritable patron de l’Exécutif. Néanmoins personne ne doute que Hamadi Jebali, l’actuel secrétaire général du parti islamiste est intéressé par le poste de président de la république perçu comme une «consécration» de sa carrière politique. Mais son parti ne semble pas lui pardonner cette idée saugrenue de «gouvernement de technocrates» qui lui a été refusé alors que la formule a fini, moins d’un an plus tard,  par triompher en tirant le rideau sur le gouvernement de la Troïka conduit par les islamistes. C’est dans ce cadre qu’il faut lire les «rumeurs» quant à la démission de Jebali d’Ennahdha pour se présenter à l’élection présidentielle en tant qu’indépendant. Mais il a été prévenu par Ghannouchi qu’en dehors d’Ennahdha il ne «pèse pas grand-chose». Au cas où il se présenterait, il n’est pas exclu qu’Ennahdha lui envoie un gros calibre comme Ali Larayedh pour lui tenir la dragée haute.

Au niveau des partis politiques, tout laisse croire que Béji Caid Essebsi, le président de Nidaa Tounes piaffe d’impatience pour s’asseoir dans le fauteuil jadis occupé par  son mentor, Habib Bourguiba. Il répète que si son état de santé le lui permet,  il ne se refusera pas ce privilège. Même s’il a été prévenu qu’on veut attenter à sa vie en raison de sa possible candidature, il n’est pas du genre à baisser les bras pour ça.

Les sondages d’opinion placent Béji Caid Essebsi de très loin à la première place des  «présidentiables». Voilà un argument de poids qui pousse déjà les dirigeants de son parti à le considérer comme le candidat incontournable et de tout faire pour  le persuader d’être  de la compétition. Le choix qu’il vient de porter sur Mohamed Ennaceur hier son candidat «indépendant» pour présider le «gouvernement de compétence» voudrait-il dire que  le nouveau promu peut être aussi celui qui portera les couleurs de Nidaa Tounes à la prochaine élection en cas de désistement pour une raison ou une autre du fondateur du mouvement. En tout cas il peut compter sur lui pour diriger le parti s’il est appelé à rallier le palais de Carthage.

Ahmed Néjib Chebbi, le président du comité politique du Parti Joumhouri qui vient de claquer la porte de l’Union pour la Tunisie trop dominée à son goût par Nidaa Tounés  ne cache plus ses intentions de se présenter. En quittant aussi le «Front du Salut», il ne fait pas que répondre à la provocation d’en être viré. Il se place en sérieux concurrent des candidats de cette coalition de partis. Habité sinon obsédé par la fonction, il s’est élevé violemment contre les «feux amis» qui cherchent à  lui barrer la route de Carthage.

Le président du Parti «Moubadara» destourienne Kamel Morjane serait probablement candidat. Les partis destouriens hors Nidaa Tounés pourraient soutenir sa candidature qui esquisserait l’unité de la famille destourienne.

Restent les autres partis, en premier lieu Jebha Chaabia qui regroupe treize partis de gauche qui pourraient fusionner pour défendre la candidature d’un des leurs, probablement Hamma Hammami. Le Parti Massar ex-parti Attajdid, héritier du parti communiste pourrait aussi présenter un candidat, Ahmed Brahim,  Samit Bettaieb ou quelqu’un d’autre.

Ce sera aussi le cas de l’Alliance démocratique dont le président Mohamed Hamdi qui s’est illustré par un discours mesuré a indiqué qu’il n’exclut pas de se présenter.

Le président du courant «al-Mahaba», Hechmi Hamdi qui a créé la surprise aux élections du 23 octobre 2011 en raflant  avec les listes d’el-Aridha (la Pétition) la seconde place ne cache pas son ambition surtout que le verrou de la double nationalité a été levé. Il se dit assuré de l’emporter grâce aux promesses à caractère populiste  du genre «demain, on mangera gratis» qu’il ne cesse de répéter et qu’il croit pouvoir avoir des effets sur les couches démunies de l’électorat.

Outre ces hommes « politiques », il n’est pas exclu que d’autres personnes, notamment des propriétaires actuels ou anciens de chaînes de télévision,  ayant créé des formations politiques pour jouir d’un certain « crédit » et fait élire ou carrément « acheté » des députés participent à la compétition. Mais leurs chances restent minimes.

Pour prévenir un « trop plein  de candidats» la loi électorale envisage des conditions draconiennes pour  la présentation des candidats, tels que le parrainage par un nombre élevé d’électeurs dans plusieurs circonscriptions du pays et le versement d’une caution financière importante qui ne sera remboursée que si le candidat obtient un taux plancher de votants (5 ou 3 %).

Dans la logique d’un scrutin à deux tours, la plupart des représentants de  partis participent à la compétition dans le but de négocier un « report des voix » au second tour, ce qui détermine les futures coalitions gouvernementales. Mais dans ce cadre reste une inconnue non encore résolue : les élections présidentielle et législatives auront-elle lieu à la même date ou à des dates différentes et dans le dernier cas quelle élection précédera l’autre ; ce qui lui donnera une indéniable prééminence.

R.B.R.

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