Opinions - 18.02.2014

5 Projets pour garantir 500.000 nouveaux emplois en Tunisie à la fin de 2015

Le cri que Mohammed Bouazizi a poussé en Décembre 2010, a été suivi par des milliers d’autres jeunes, qui comme lui ne demandaient qu’une chose: travailler et vivre dignement. Le droit au travail, qui est un droit humain universel et fondamental, doit être garanti à toutes et à tous. En fait,il n’y a pas de vie digne sans un travail et un salaire décents.

Le 22 Janvier 2014, j’ai publié dans ‘Leaders’ un article qui s’intitule: «Et si la solution exigeait qu'on invente un nouveau modèle de développement?» .Les différentes réactions que j’ai reçues sur différents media m’ont encouragée à poursuivre ma réflexion et à proposer quelques idées concrètes car je demeure fondamentalement convaincue, comme certains tunisiens,qu’il est nécessaire d’ouvrir un débat national sur le modèle de développement dont nous avons besoin. Je n’ai d’ailleurs pas l’ombre d’un doute que notre génie collectif est capable d’inventer un tel modèle.

J’ai aussi conscience de la multi-dimensionnalité que devra avoir ce modèle et en étant simplement juriste, je n’ai pas la prétention de proposer des solutions économiques, socio-politiques, géostratégiques…etc. C’est pour cela que je sais que ce n’est qu’en mettant,non seulement nos connaissances en commun mais surtout partager nos idées opérationnelles,et desactions réussies sur le terrain, que nous y arriverons.

Je suis en admiration en face des expériences de certains pays, qui à la sortie d’une crise, d’un conflit, d’une révolution ou d’une guerre, se sont mis à réfléchir à des solutions très innovantes, à court, moyen et long terme pour le bien-être de leur peuples. En fait, si nous concentrons nos efforts sur la notion de bien-être et de bonheur, nous pourrons assurer le meilleur modèle de développement. Certains pays ont d’ailleurs arrêté de mesurer leur développement en fonction de leur Produit Intérieur/National Brut ou quelconque indicateur économique et désormais, ilsmesurentleur développement en fonction du degré de bonheur de leurs citoyens. Le Rapport Mondial de 2013, sur le bonheur en tant qu’indicateur de développement vient de paraitre ce mois-ci, sous le titre: «World Happiness Report, 2013».

Ce dont la Tunisie a besoin, ce sont différent projets prêts à être implémentés aujourd’hui, et qui puissent œuvrerà l’insertion progressive et rapide de 750.000 tunisiens dans le monde du travail. Notons que les derniers chiffres du chômage nous donnent un pourcentage alarmant de 15,7%.Pour les jeunes diplômés, il est de 33,5%, et il est de 43,5% pour les jeunes filles.

Cet article se propose de présenter une stratégie basée sur 5 projets capable d’offrir 100.000 possibilités d’emploi par projet totalisant un demi-million d’emploi en 22 mois. Certain de ces projets ayant déjà réussi dans d’autres pays Arabes, seront très facilement transposables en Tunisie. D’autres sont implémentés dans d’autres pays en dehors de notre région, mais peuvent tout aussi bien être adaptés et établis en Tunisie.
Afin de réussir cet exploit, toutes les énergies, bonnes volontés et engagement de très grandes franges de la société doivent œuvrer ensemble à assurer un financement adéquat.

Ces projets seront basés sur les valeurs universelles des droits humains et du respect de la dignité humaine. Ils seront aussi basés sur le devoir de solidarité que ceux qui ont un travail ont vis-à-vis, de ceux qui n’en ont pas.Cette même solidarité qui a toujours existé dans la société tunisienne et qui s’est manifestée durant la révolution et après.

1er Projet: Première expérience des diplômés vers leur premier emploi

Harmoniser les besoins des jeunes diplômés avec les besoins du marché du travail:
Beaucoup de jeunes diplômés, à la recherche d’un emploi, ont de l'énergie, des connaissances de base et quelques compétences. Or la première question qui leur est posée dans les interviews d’embauche est  : Quelle est votre expérience? D'autre part, la plupart des compagnies du secteur privé et des organisations de la société civile ont la capacité d’accueillir des stagiaires qui doivent être bien identifiés et préparés, pour leur donner justement cette expérience, moyennant une indemnisation décente, en cas de besoin. Un projet similaire a été en mesure de faire bénéficier de cette ‘Harmonisation’ plus de 350.000 jeunes, dans un pays Arabe. 60% de ceux-ci ont pu trouver un emploi à la suite de cette expérience, et les 40% restant, ont choisi de poursuivre des études dans un autre domaine ou d’approfondir leur formation supérieure en la couplant avec l’apprentissage d’une langue étrangère, de l’informatique ou autre. Cette expérience peut être mise en place très rapidement en Tunisie.

2eme Projet: Pour une plus grande résiliencedes jeunes

Plusieurs segments de la jeunesse tunisienne est en train de faire face à des défis majeurs: pauvreté, violence familiale, toxicomanie, exploitation sexuelle, délinquance juvénile…etc. Des approches basées sur les compétences de la vie, l'intelligence émotionnelle et les programmes de résilience de la jeunesse ont été appliqués dans un certain nombre de pays Arabes avec un succès remarquable. J’ai moi-même assurer ce genre de formation à Djibouti, au Yémen, à Gaza et au Kuwait…. Nous pouvons désormais mobiliser une large proportion de la jeunesse avec la participation significative de la communauté mettant en œuvre ces approches.De plus, il est très urgent que la Tunisie mette en place une stratégie nationale de lutte contre la drogue. Une stratégie qui peut, avec exactement le même budget que l’Etat tunisien est en train de dépenser, sans résultats malheureusement, offrir de désengorger les postes de polices, les tribunaux, et les prisons. Avec l’engagement et la bonne volonté de tous, cette stratégie peut être mise en place demain.

3eme Projet: Repenser le modèle coopératif

Le modèle coopératif, en Tunisie, est lié, dans l’esprit de la majorité, à un échec. Cependant, la société civile, l’a appliqué d’une manière différente et très réussie, dans certains pays arabes. Les coopératives basées sur le travail collectif des communautés locales, incluant les coopératives d’achat, a obtenu des résultats qui méritent qu’on repense ce modèle et qu’on l’adapte pour l’appliquer chez nous. L'environnement international est de plus en plus propice à la coopération Sud-Sud encourageant l’élargissement et l’approfondissement de cette expérience. Et si le terme «coopérative» peut être mal-interprété, changeons-le, mais gardons l’essence de ces mécanismes basés sur la solidarité communautaire.

4eme Projet: Promouvoir les projets écologiques par et pour les jeunes

Les projets écologiques sont un outil efficace qui devrait être mis entre les mains de chaque communauté urbaine et rurale pour atténuer les problèmes environnementaux et ceux liés au manque d’eau potable, qui ont un impact considérable dans nos régions. Nous devons aussi compter sur la sagesse créatrice de nos personnes âgées afin de maximiser les avantages de l'utilisation des ressources locales. Cet échange d'expériencesentre les générations est la pierre angulaire de la réussite de ce modèle. Répliquer à grande échelle ce modèle que j’ai pu expérimenter, personnellement, dans le Sud de l’Inde, pourrait apporter une réponse à la pénurie d'eau et proposer des solutions écologiques aux défis majeurs auxquels font face nos régions rurales. Les jeunes des régions pourraient mettre en place ces solutions innovantes et durables qui pourraient les inciter à rester dans leurs villages et être fiers de contribuer au développement de la terre de leurs ancêtres. Ces projets nécessitent très peu de financements et peuvent être mis en place dans un avenir très proche.

5eme Projet: Promouvoir l’indépendance socio-économique des jeunes femmes

Les projets intégrant le plaidoyer, la formation aux droits humains ainsi que différent outils assurant l’indépendance financière et économique, y compris le micro-crédit et le développement communautaire pour les femmes et les jeunes filles ont montré un succès remarquable dans plus d'un pays Arabe. Mobiliser des partenaires nationaux, dont notre communauté de tunisiens à l’étranger, peut développer ce modèle intégré et faire face au chômage des jeunes filles rurales et urbaines vivant dans des quartiers pauvres.

En conclusion et pour compléter le tableau autour de ces projets, j’expliquerai dans mon prochain article :

1) Les Besoins en formation; 2) L’impact favorable sur toute la communauté; 3) Le budget adéquat et comment le trouver; 4) Les différentes étapes à accomplir, 5) Comment transformer la bureaucratie en alliée du développement, 6) Comment transformer nos ambassades en agences pour l’emploi œuvrant à procurer 100.000 emplois dans les deux prochaines années…etc.

En attendant, et comptant sur notre génie collectif, j’apprécierai de recevoir vos idées sur des projets similaires. Ces idées peuvent être partagées online dans la rubrique: ‘Commentaires’en bas de cet article. Je m’engage à compiler toute la liste et la mettre en annexe de mon prochain article.

khadija Moalla

Tags : Tunisie