Opinions - 14.01.2014

ISIE: Dénouement, oui mais…

Le mercredi 8 Janvier 2014 a été le jour du dénouement de l’ISIE ! Comme le stipule la révision de la loi n°23 du 20 décembre 2012 portant création de l'Instance Supérieure Indépendante des Elections, l’Assemblée Nationale Constituante a élu en plénière les 9 membres de l'instance. Doit-on se réjouir de cela ? De prime abord, oui car cette instance a tardé à être composée alors qu’elle aurait du l’être dès 2011 après la mise en place de l’assemblée nationale constituante, de son règlement intérieur et de la loi sur l'organisation provisoire des pouvoirs publics.
 
Certains politiciens et citoyens se félicitent de cette première ISIE votée ! quant à moi, je ne peux me réjouir d’un simulacre d’élections. Une grande majorité des 217 élus de l’assemblée n’avaient pas une connaissance complète des 365 candidates et candidats et de leurs dossiers, comment alors ont ils pu voter? et pour qui ? 
 
En fait, le choix des candidats s’est fait en dehors de la plénière, les consignes de vote pour la composition de consensus « ou marchandage» comme chacun se plairait à l’appeler  ont par la suite été respectées en plénière ! Cela ressemble à une validation d’une composition politisée de l’instance et qui échappe ainsi au contrôle du tribunal administratif et à son regard sur la grille d’évaluation et sur les travaux de la commission de tri de cette instance.
 
Je ne peux me réjouir du consensus qui sacrifie la compétence. Leila Alexandra Hovelacque (15 ans d’expérience en matière d’élections pratiquées à l’international) classée 10ème sur la liste des Tunisiens à l’étranger et 1ère sur la liste féminine de cette même catégorie, a été sacrifiée au profit de Mme Faouzia Drissi qui n’a à son actif que l’expérience du 23 octobre 2011. Nos élus et Ennahdha en particulier ont privé sans raison valable la nouvelle ISIE d’une compétence internationale dont la neutralité et l’intégrité ne sont pas à démontrer au vu de ses nombreuses participations aux élections à travers le monde.
 
Je ne peux me réjouir du non-respect de l’ordre de mérite des candidats suivant la liste élaborée par les élus eux-mêmes pour le choix des 9 membres de l’instance.
 
Comment se fait-il que Mme Faouzia Drissi qui arrive en 20ème position ex aequo avec 37 autres candidats soit la candidate retenue ? Suivant quelle logique, Maître Abdelkerim Rajah classé 4ème sur la liste des 65 avocats et alors qu’il a compté parmi  les 4 membres auditionnés en juillet 2013, a été sacrifié au profit du 14ème de la liste, Maître Kamel Toujani ? 
 
Que doit-on répondre à nos étudiants, aux majors d’entre eux et à leurs parents qui s’inquiètent de voir que la compétence de nos jours ne paye plus. Et si nous, enseignants, décidions de prendre nos élus en modèle en nous réunissant en conseil des classes pour décider collégialement et sans critères transparents de la réussite ou pas des étudiants, lycéens et élèves et validions a posteriori notre décision par le passage des épreuves écrites, quelles seraient vos réactions, élus du peuple et parents que vous pouvez être, si vos enfants  était lésés de la sorte ?
 
Le message que les partis politiques et Enahdha en particulier envoient à une majorité des 94,1 % de Tunisiens non adhérents aux partis politiques (chiffre extrait du Baromètre politique Tunisie, 3C études, décembre 2013) est que l’accès aux hautes fonctions par désignation ou élection sera réservé à un vivier restreint d’élites à allégeance politique. En tant qu’enseignante et en tant que militante dans la société civile, je ne peux l’accepter car ce n’est pas conforme aux  maîtres mots de cette révolution et à mes valeurs.
 
Si nous faisons ces critiques aujourd’hui c’est pour améliorer les pratiques du lendemain. Les membres de la nouvelle ISIE que nous saluons et qui ne sont en rien responsables de la manière dont ils ont été élus, nous les félicitons et nous les soutenons. Et à tous ceux qui ont de mauvaises intentions, nous disons que nous allons observer l’ISIE, ses travaux et le processus électoral  avec un œil de lynx. 
 
Ingénieur en Génie Energétique
Docteur en Génie des Procédés Industriels
Maître de Conférences en Génie Chimique 
Membre fondateur de l’Association Tunisienne de Défense des Valeurs Universitaires Formateur d’observateurs et Observateur aux élections du 23 Octobre 2011 
 

 

Tags : isie  
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3 Commentaires
Les Commentaires
Héla - 15-01-2014 15:20

VIGILANCE et ACTION EFFICACE au sein de la société civile: ce sont-là les éléments-clés pour sortir de l'ornière créée par le vote du 23 octobre 2011.

besma - 15-01-2014 21:46

nous esperons que le PR Sarsar puisse lire votre article tout le monde la connait ...

FBF - 21-01-2014 13:57

Mme Nihel est frustrée comme le sont des millions de tunisiens. Que voulez-vous, c'est pourtant un moindre mal. La société civile sera la seule garante d'élections libres et transparentes. Il faudra aussi d'ores et déjà tracer la stratégie de mobilisation des jeunes pour qu'ils aillent voter le jour J. Sans cela, tous les efforts déployés seront vains et on retombera dans la médiocrité de la gouvernance, et surtout dans un totalitarisme idéologique ou religieux, alors bougeons tous pour réussir ces élections et protéger notre pays contre toute probabilité d'un retour de l'obscurantisme.

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