News - 23.10.2013

Quand Le mufti s'essaye à la politique

Succédant au Cheikh Battikh, il ya quelques mois, le nouveau mufti, Hamda Saied, s’était fait remarquer jusque-là  par sa discrétion et son souci de se cantonner au champ religieux conformément à une loi non écrite à laquelle s’étaient pliés la plupart de ses illustres prédécesseurs depuis… la période hafside, évitant ainsi toute instrumentalisation politique.

Invité samedi  par la chaîne El Watanya, notre mufti  a décidé de se départir de cette réserve qui, apparemment, lui en coûtait en tirant à boulets rouges sur Bourguiba. Interrogé sur les  causes de l’émergence du terrorisme dans notre pays, il a accusé bourguiba d’en être le principal responsable pour avoir « déconseillé fortement le jeûne »,  « encouragé les femmes à découvrir leur visage » et « fermé la Zitouna » au début de l’indépendance, reprenant ainsi la vieille antienne du « Bourguiba- mécréant-franc-maçon etc.  Cette prise de position nous renvoie à une pratique qu’affectionnait une partie de nos cheikhs qui consistait à se rapprocher des puissants du moment. Car c’est exactement le langage que veulent entendre nos dirigeants actuels qui n’ont jamais porté Bourguiba dan leur cœur, même s’ils affectent de réprouver l’attitude du mufti.

Mais venons-en aux accusations. Bourguiba n’a jamais fermé la Zitouna. Au contraire il a rénové son enseignement qui n’a pas évolué depuis des siècles, répondant ainsi aux vœux des cheikhs zitouniens de l’époque, et notamment le plus illustre d’entre eux, Cheikh Tahar Ben Achour ; il n’a pas interdit le voile, puisqu’il est tombé en désuétude, étant incompatible avec les contraintes de la vie moderne ; il n’a pas déconseillé le jeûne, mais s’est fondé sur un verset du coran pour conseiller à ceux qui ne peuvent pas observer cette prescription divine pour une raison ou une autre de s’y abstenir, sans avoir à aucun moment usé de coercition. D’ailleurs, la majorité des Tunisiens ne l'ont pa suivi.

On a beau chercher, on ne trouve pas le rapport de causalité entre les griefs du mufti et l’émergence du terrorisme. Que je sache, le maintien de l’enseignement traditionnel ou le port du nikab n’ont pas empêché le terrorisme de se développer dans des pays comme l’Egypte, le Pakistan, le Soudan ou le Yemen.

Notre mufti s'essaye donc à la politique. Le moins qu'on puisse dire est que ses débuts ne sont pas très brillants.

Hédi